Pas de suspense à l’annonce de ce « jeu », Nintendo étant plutôt friand de portages faciles et enrichissants vers sa console portable fétiche. Est-ce que la version 3DS est complémentaire à celle sur Wii U? Vivons-nous une révolution du genre? Faut-il courir l’acheter? Le stagiaire recevra-t-il une augmentation? La réponse ci-dessous. Et c’est non.
Les éditeurs de Mario ne sont pas une invention récente. Depuis les débuts de l’émulation de consoles sur PC, des myriades d’outils ont été codés pour hacker les jeux ou lire dans leurs entrailles, souvent dans le but de casser le jeu – c’est-à-dire de trouver des raccourcis non prévus par les développeurs – ou alors de faire du « tool-assisted speed-run ». Parmi tous ces outils, certains permettent de carrément modifier l’architecture du jeu, comme Lunar Magic sur PC (de 2001, mais quand même pas légal!) qui permet une refonte totale de Super Mario World. En 2015 Mario Maker sort sur Wii U. Je voyais ça comme un mélange de paresse à innover dans la plateforme 2D, une idée des génies (hum hum) du marketing de Nintendo et une sorte d’hommage à la franchise et aux joueurs. Environ 1 an plus tard, la version 3DS est disponible, mais surtout une communauté importante s’est formée autour de la création et du test de niveaux parfois extrêmement originaux. En bon public – mon unique défaut – je me suis dit « Super! On va pouvoir jouer à tous ces niveaux n’importe où! ».
La particularité des Mario Maker, qui est à la fois leur force et leur faiblesse, est que le contenu est finalement entièrement créé par les joueurs eux-même. Nintendo offre les outils et une plateforme de partage et se retire de la scène. Vous avez déjà vagabondé sur un quelconque magasin d’applications pour mobile? A chaque fois je suis halluciné de la quantité d’inepties qu’on y trouve! Avec Mario Maker, c’est tout pareil. Il y a des tas de niveaux inutiles imaginés par des enfants de 6 ans pour la fête des mères où il n’y a rien à faire sauf ramasser des pièces qui écrivent « LOL ». Par chance, on peut trouver des créateurs qui revisitent complètement le genre Mario pour mettre au point des niveaux où il faut résoudre des énigmes pour progresser ou utiliser des objets de façon non orthodoxe. En général, je préfère chercher ces niveaux sur des forums ou depuis des chaînes Youtube… Sauf que tout ceci n’est valable que pour la version Wii U. Hé oui, dans sa grande clairvoyance, l’éditeur nippon a raboté la seule fonction qui rendait Mario Maker intéressant: le partage de niveaux en ligne! La version portable permet, sur le papier, de jouer à toutes les inventions issues de la Wii U, mais en pratique, ça se limite aux niveaux « recommandés » des serveurs Nintendo et qui ne comportent pas d’éléments débloqués par Amiibos. Pas d’outil de recherche par nom ou par créateur. En plus, impossible de partager ses œuvres en ligne, le seul moyen étant d’en faire profiter les autres est… Street Pass!
Je conçois tout à fait qu’une copie conforme de la version de salon sur portable n’est pas possible au vu des limitations techniques, mais s’il y avait bien une fonction à ne pas bazarder, c’était le partage en ligne! Grosse déception donc, on ne peut échanger ses niveaux qu’en croisant des gens par Street Pass ou par pur hasard dans les choix du jour. Malgré ses nombreuses amputations, la version 3DS possède tout de même quelques nouveautés qui méritent d’être mentionnées. La principale étant la façon de débloquer les éléments de l’éditeur. Contrairement à la première version, ici la plupart des environnement et objets sont disponibles dès le début et les suivants se débloquent en progressant dans le mode « Super Mario Challenge ». C’est une série de 100 niveaux imaginés par les développeurs pour découvrir les éléments et mécaniques disponibles dans Mario Maker. A mesure de la progression, on reçoit des nouveaux élément à placer dans les niveaux, ainsi que les perles de sagesse de Yamamura… le pigeon qui parle. Ces 100 niveaux offrent aussi un défi supplémentaire qui consiste à les terminer d’une façon particulière, par exemple en éliminant uniquement certains ennemis, ou en passant par une zone cachée du niveau. Malheureusement ces mécaniques originales ne sont pas disponibles dans le mode de création.
Les apparences des textures nostalgiques (original, Bros 3 et World) rendent très bien sur le petit écran de la 3DS, mais le style New est celui qui a le plus souffert durant le transfert à cause de la baisse de résolution. En outre, l’utilisation des deux écrans est très bien pensée pour la création. Au final, Nintendo n’aura une fois de plus pas réussi à surfer sur la vague (du moins les remous) produite par ses sorties précédentes et ce Mario Maker pour 3DS est simplement ce qu’il est: un jeu au petit prix et petit contenu. Au fond, à quoi servent ces Mario Maker? Est-ce que Nintendo jette l’éponge pour la plateforme 2D traditionnelle afin de se concentrer sur les opus 3D en costume de chat? Ou est-ce que c’est une façon de sonder les goûts des joueurs pour préparer une création détonante? L’avenir nous le dira, mais une chose est sûre : s’il vous plaît arrêtez de nous décevoir avec des demi-jeux, Monsieur Nintendo.
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