Chance avec les loups [Lost in Random]

Je me rappelle d’une chronique radio sur Couleur 3 dans laquelle un animateur avait décidé de prendre toute ses décisions pendant une journée en tirant à pile ou face. Le hasard, ce facétieux concept qu’on ne comprendra probablement jamais complètement. Mais ça fait des chroniques marrantes.

Des idées! Il nous faut des idées! Un concept! Un schéma! Une boucle de gameplay originale! Ou une hybridation! Oui, ça c’est bien. On prend des choses qui n’apparaissent traditionnellement pas de concert et on les fusionne en mode Dr. Frankenstein. Soit ça nous donne une créature difforme et pataude. Soit ça donne Lost in Random qui marque le dunk de l’inventivité, tel un Lebron James sans Bugs Bunny, rapport à des choses qui ne vont pas ensemble.

 

Lost In Random PS5 destin

Dois-je prendre des Miel Pops ou du bircher muesli pour le p’tit déj?

Un dé c’est une arme, Madame!

Si la première heure de Lost in Random m’a donné l’impression d’un énième jeu de plateforme-action (et pas un très bon qui plus est, vu qu’on ne peut pas sauter), tout est devenu beaucoup plus intéressant dès le moment où se met en place son élément central. Suivez attentivement, ça vaut la peine. Le personnage que l’on dirige, Paire de son prénom, est une petite fille qui recherche sa soeur (Impaire) kidnappée, mais qui n’a pas de moyens offensifs pour affronter les robot hostiles qui se dressent sur son chemin. Tout au plus peut-elle esquiver en se jetant sur le côté. Et Paire ne dispose que d’une fronde, qui ne cause aucun dégâts, mais qui va pourtant s’avérer fort utile.

 

Lost In Random PS5 décisse

Décisse, plus qu’un dé: un véritable allié de combat!

 

Ça passe beaucoup mieux à l’image qu’à l’écrit, alors on va essayer de détailler cette boucle en huit points

  1. La fronde peut déloger des cristaux sur les ennemis.
  2. En collectant ces pierres, on rempli une jauge.
  3. Une fois celle-ci pleine, cela permet de piocher une carte aléatoirement (dans un deck personnalisé, mais une chose après l’autre).
  4. On peut piocher jusqu’à cinq carte à la fois et à tout moment on peut lancer un dé.
  5. Le résultat indiqué par ce dé indique un nombre de points que l’on peut dépenser pour jouer nos cartes (pensez aux points de mana que coûtent les cartes dans Hearthstone).
  6. Grâce à ces cartes, on peut s’équiper d’armes, de sorts défensifs ou offensifs, de soins, etc.
  7. Là on peut marraver à tout va, jusqu’à épuisement de la résistance de l’arme ou du temps imparti d’un sort.
  8. Retour au point 1

NDTeiki : Ou alors tu peux jouer selon les règles à l’Aquitaine avec des poutres de 12 et du savon de Marseille.  

 

Random PS5 arrêt du temps

Lorsque le dé est lancé, le temps s’arrête. Ce qui laisse le champ libre pour choisir ses cartes judicieusement et ensuite se replacer stratégiquement (dans le dos d’un ennemi)

Attirer les cartes

Progressivement, on a l’occasion d’acheter des nouvelles cartes et d’en choisir quinze afin de personnaliser son deck. Ainsi on peut adapter ses préférences de jeu et de combat en fonction des situations. Oui, ça a l’air compliqué là comme ça, mais je vous jure qu’on prend le coup très rapidement. Au pire, faites une pause dans la lecture, allez voir la vidéo en bas du test et revenez ici. C’est bon, c’est plus clair maintenant? Super.

 

Lost In Random PS5 deck

Hum, des cartes qui font beaucoup de dégâts mais coutent cher? Ou bon marché mais faibles?

 

Dans cette vidéo vous aurez donc aussi remarqué une direction artistique assez particulière. Sans atteindre le glauque de Little Nightmares, on est quand même loin des couleurs chatoyantes de It Takes Two, par exemple. Néanmoins, on constatera que le studio qui a créé Lost in Random (Zoink Games) est suédois, tout comme Tarsier Studios (Little Nightmares). Je pense que c’est un appel au secours, ces gens sont en souffrance. L’hiver sans soleil chaque année ne joue clairement pas en faveur de la santé mentale.

 

Lost In Random PS5 dialogues

Beaucoup de choix de dialogues et pourtant on peine à voir leurs conséquences.

 

On peut reprocher une certaine répétition dans les PNJ (une petite dizaine de modèles qui se décline), ainsi que dans la construction des quêtes secondaires (consistant presque exclusivement à retrouver quelqu’un, puis à revenir vers le mandant pour lui signaler où se trouve cette personne). En revanche, l’univers est original et très bien pensé. Tout s’articule autour du concept de hasard et de lancés de dés. Les six mondes correspondent aux six faces du cube à points et ces régions sont thématisées en fonction. Par exemple, le début se déroule parmi le bas peuple, les « Unards », tout en bas de l’échelle sociale. Et chaque progression est l’occasion de découvrir une nouvelle cité, socialement supérieure. Tous les personnages de Doubleville vivent avec un dédoublement de la personnalité, etc. C’est ingénieux et les références à l’univers des jeux de société fonctionnent très bien.

 

Random PS5 Troyaume

Troyaume et son champ de bataille géant. Chaque région est un niveau, avec une quête endémique.

Destinée, On était tous les deux destinés

Lost in Random n’est pas très difficile, y compris dans ses combats de boss. On en vient à bout après une vingtaine d’heures environ, quêtes secondaires y compris. C’est vrai qu’une fois qu’on a repéré qu’elles sont les cartes un peu pétées, une certaine répétitivité peut s’installer. Mais le voyage était charmant. Pour un jeu indé ayant remporté le « Best Indie Game Award » à la Gamescom, il vaut la trentaine de francs que votre revendeur préféré vous demandera. Un peu passé inaperçu à mon goût, il mérite un peu plus d’attention, ne serait-ce que pour cette boucle vraiment originale et l’hybridation du jeu de carte avec l’action/aventure. C’est une jolie fable sur le déterminisme, l’aléatoire, le destin et le libre-arbitre. Mais sans basketteur ou lapin cartoon.

 

Lost In Random PS5 Lucasarts

LucasArts!! Je connais, c’est LucasArts!! La prophétie c’est leur retour, c’est ça?!!

 

Note: 8 providence sur 10

Testé sur PS5

Disponible également sur PS4, Xbox One & Series X|S, Switch, Origin, et Steam.

EA, petit producteur local dont vous me direz des nouvelles.

Telle une médaille de bravoure qu’un scout arbore après avoir vendu toutes ses boîtes de cookies, Lost in Random porte fièrement l’emblème « EA Originals« . Cette catégorie désigne des jeux indépendants bénéficiant de l’aile financière bienveillante de EA. Oui je sais, ça fait bizarre. Mais il faut reconnaître que c’est efficace. OK, dans la liste on retrouve Rocket Arena (si vous ne savez plus de quoi il s’agit, c’est normal), mais on y trouve surtout It Takes Two, Knockout City, Sea of Solitude et plus longtemps Unravel, A Way Out et Fe (déjà développé par Zoink).

Voir apparaître ce label est donc signe de qualité vu ce palmarès quasi-sans faute. Il est réjouissant que cette branche existe, permettant de donner un tout autre sens à la phrase « Nous aimons les jeux vidéo » chez EA, que « Nous aimons l’argent que nous rapportent les passes de combat de nos jeux AAA insipides conformistes et creux ». Évidemment, on rétorquera que c’est grâce à ces rouleaux compresseurs à fric que les Originals peuvent exister. C’est un peu léger tout de même.

L’originalité a du bon et le label porte ici bien son nom. Je ne sais pas pourquoi, mais l’effet n’est pas du tout le même chez moi, quand je lis « Ubisoft Original » au début de Far Cry 6.

 

Author: Founet

A ne pas confondre avec le village vaudois, est à peine plus jeune qu’une Famicom. Vouant un culte à George, il découvrit son amour du jeu vidéo et de la techno allemande pendant les grandes années de Lucas Arts. De ses nombreuses heures passées à cliquer lui vient son humour absurde et sa cleptomanie. Frappé d’une mystérieuse malédiction, les machines semblent se rebeller lorsqu’il les manipule ou fait mine de les regarder. Founet ne roule jamais en-dessous de 88 miles à l’heure et rêve de maîtriser la télékinésie grâce à la Force. En attendant de passer maître Jedi, il joue à la Wii U. Accessoirement rédacteur en chef, quand il arrive à se faire entendre des autres, qui mettent le son trop fort, les farceurs.

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