Certains l’appellent CNews [The Fabulous Fear Machine]

The Fabulous Fear Machine est un jeu narratif de stratégie, d’horreur, de gestion et d’aventure. Il a été développé par Fictiorama Studios et édité par AMC Games, la branche jeux vidéo de AMC Network. Oui oui, les mêmes qui ont produit les séries Breaking Bad, Mad Men et The Walking Dead. Sorti le 4 octobre dernier, cet opus est passé relativement inaperçu malgré des retours très positifs sur Steam. Entre mysticisme et fake news, le jeu vous invite à faire naître la peur dans le cœur des hommes dans le but d’asservir l’humanité et de répandre le chaos. Toutefois, une question se pose : The Fabulous Fear Machine va-t-il plus loin que son concept original ? La réponse dans ce test.

 

Avec un petit côté Tchernobyl qui passe bien

De l’imagerie post-apo propre et sans bavure.

 

La perfide Albion The Fabulous Fear Machine

Tenez-vous le pour dit, The Fabulous Fear Machine n’est pas (encore) disponible en français. Vous aurez le choix entre l’anglais, l’allemand, l’espagnol, le russe et le chinois simplifié. Du tutoriel au lore en passant par l’interface, il y a beaucoup de texte à l’écran. Je ne saurais donc que trop vous conseiller, si vous ne maitrisez aucune des langues proposées, d’attendre que le jeu soit traduit. Personnellement, j’ai joué en anglais, une langue dont je maitrise bien le langage courant, mais j’ai quelques fois dû vérifier la traduction de certains mots. Certaines phases vous demandent d’attribuer des expressions aux rumeurs que vous propagez. Ce qui ressemble à une fiche digne de l’école primaire dans votre langue maternelle peut s’avérer relativement hasardeux lorsqu’on vous propose des locutions spécifiques dans un langage que vous ne connaissez pas parfaitement.

 

Ne vous inquiétez pas, le reste du jeu est beaucoup moins scolaire.

La ressemblance avec les fiches de français de mes enfants en 3e Harmos est relativement frappante.

 

Le syndrome Magneto

The Fabulous Fear Machine vous plonge dans une diégèse qui ressemble beaucoup à notre monde, à quelques détails près. La fameuse machine du titre est un automate vintage représentant un fakir dans un petit stand en bois. Vous incarnerez divers avatars en fonction des campagnes, auxquels le mystérieux appareil propose un pacte des plus faustien : il vous permettra de réaliser votre souhait le plus cher et, une fois celui-ci accompli, votre histoire ira rejoindre celles de ladite machine. Car oui, vous disposerez de moult rumeurs et autres légendes urbaines que vous répandrez dans la population afin d’atteindre vos objectifs. Votre première incarnation s’appelle Jen Hammond (j’ai dépensé sans compter…), une scientifique de renom et dirigeante d’une grosse entreprise pharmaceutique. Après une enfance difficile et solitaire, elle souhaite être reconnue pour son génie et sa détermination.

 

Les yeux ne sont-ils pas le miroir de l'âme ? je pose la question…

Une introduction qui met du baume au cœur… Qu’est-ce qui pourrait mal se passer ?

 

L’automate lui propose donc son concours, ce qui ravit notre pharma-queen. Ambitieuse et sans aucune espèce d’éthique, elle s’évertuera à répandre des histoires de virus, de vaccins rivaux défectueux et de menaces sanitaires majeures pour se retrouver enfin au centre de l’attention. Mais la marche vers le succès s’avèrera semée d’embuches et d’adversaires aussi savoureux que cocasses…

puni par manque de pièce ? est-ce un jeu de droite ?

La vie tient parfois à peu de choses…

 

Du click et du clash

Dans le but d’atteindre vos objectifs, vous serez amenés à répandre des rumeurs dans différentes régions du monde, afin que la peur colonise le territoire dans votre intérêt. Classées dans différentes catégories, ces fake news vous coûteront du carburant, la ressource principale du jeu. Vous obtiendrez périodiquement un apport de ce combustible, toutefois méfiez-vous, car cette contribution ira de manière décroissante. Si en début de manche vous obtiendrez des centaines d’unités de ce comburant tous les quelques jours, en fin de partie ce qui était un bénéfice automatique se transformera en perte sèche. Vous pourrez néanmoins échanger des ressources secondaires contre le précieux carburant dans un but d’accumulation rapide ou de maîtrise de son déficit. Il sera donc crucial de porter toute votre attention sur ces fluctuations pour éviter une banqueroute qui figerait complètement votre marge de manœuvre.

 

De l'impérialisme des idées.

Vous devrez répandre vos théories du complot et saturer l’espace mental des citoyens de régions entières.

 

Ce carburant vous sera également nécessaire pour envoyer un employé explorer une nouvelle contrée. Ces sbires seront vos yeux et vos oreilles. Ils interagiront à votre guise avec les locaux, espionneront vos ennemis et implémenteront des extracteurs de ressources secondaires dans les différents quartiers des villes dont vous avez connaissance. Ces valeurs, au nombre de huit, auront différentes utilités. Comme dit plus haut, elles vous serviront de monnaie d’échange contre le sacro-saint carburant. Elles seront également nécessaires pour améliorer l’efficacité des rumeurs que vous avez répandues, comme celles de vos agents. Enfin, elles vous serviront également pour avorter les plans de vos adversaires ou pour des événements ponctuels. De plus, certaines régions géographiques seront disposées à accueillir des mythes locaux et spécifiques, ce qui influencera votre stratégie.

…En même temps, moi, j'suis avec une hyène…

Vos sbires évoluent en acquérant de l’expérience et vous apprendrez à connaître leur part d’ombre, ce qui n’est pas toujours rassurant.

 

Pulp Faction

La direction artistique de The Fabulous Fear Machine est tout bonnement stupéfiante. Avec son esthétique de comic pulp des années 50, on est directement plongé dans une ambiance propre à ces récits. Quelque part entre un antihéros lovecraftien et un Lex Luthor sous acide, vos avatars oscillent entre la démesure de leurs ambitions et la pitié qu’ils sauront susciter. Leur ubris n’aura d’égal que la lamentable banalité de leurs aspirations. Les visuels magnifiques qui se révèleront sous forme de cases de bande dessinée raviront les amateurs du genre. De plus, le sound design enfonce encore le clou dans le côté série B, avec des notes de synthé dignes d’un Carpenter grande époque.

 

On est souvent puni par là où on a pêché, selon les croyants...

Spoiler : ça finit mal…

 

Tu connaîtras la peur

J’avoue humblement avoir été effrayé. Pas par les visuels glauques ou les choix moraux ambigus. Non, j’ai vraiment eu peur que le jeu ne propose rien d’autre qu’une repompe des théories du complot actuelles. Pire, qu’il ne les valide. Ce que je n’ai pas encore développé, ce sont les rivaux qui tenteront de vous supplanter. Dans le cas de notre pharma-queen préférée, on rencontre évidemment des industriels concurrents, mais aussi une famille de gourou anti-vax. Et là, j’ai entraperçu le génie de The Fabulous Fear Machine. Dans cet opus, tout est conspiration, rumeur et fake news, même les complotistes. Prodige pour moi, partie de claquette pour d’autres, chacun sera juge. Le fait qu’en fin de partie, une bande de zététiciens fanatiques vous prennent d’assaut à bord d’un dirigeable ajoute encore, selon moi, un degré de lecture que je trouve particulièrement délectable.

 

Vraie rumeur de l'époque, ceci mis à part...

La musique, de nos jours, ça rend les jeunes débiles, de mon temps, tout ça…

 

Bref… The Fabulous Fear Machine

J’ai beaucoup aimé ce jeu, plus subtil qu’il n’y parait. Certes, le gameplay n’est pas fou puisque relativement proche d’un jeu de gestion résolument classique. Assurément, cet opus n’est pas disponible en français. Évidemment, le sujet est clivant (si vous êtes complotiste et que vous avec tenu jusqu’ici, bravo à vous). Cependant, j’ai pris énormément de plaisir à découvrir ce titre et à y progresser. Aussi cynique qu’exigeant, The Fabulous Fear Machine est un excellent divertissement et saura, si c’est votre truc, vous faire réfléchir, ce qui n’est pas rien. J’ajoute que ce test (hormis quelques images) ne spoile en rien l’aventure et se concentre sur la première campagne.

9 Francis Lalane en cuissardes/10

Testé sur PC et disponible sur Mac OS

 

 

Author: Plissken

Élevé dans les hautes terres du Val-de-Travers, au sein d'une secte vénérant l'absinthe, il en fut banni à la suite de ses propos, bientôt qualifiés d'hérétiques. En effet, le visionnage du film «The Big Lebowski» lui fit remettre en question son éducation obscurantiste. Honni de tous, il hante désormais les supérettes vêtu d’un peignoir, sirote des russes blancs et joue sur son PC (c’est chiant comme Drucker, le bowling). Lors de ses moments de lucidité, il se plonge dans les écrits du Necronomicon afin de maudire les développeurs de DLC abusifs et de tailler le bout de gras avec les grands anciens. Virtuellement, Plissken se complaît dans les jeux moralement ambigus, absurdes et difficilement compréhensibles par le commun des mortels. Ses tests sont-ils autant maudits que son livre préféré ? Oserez-vous les lire ?

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