2020 n’est certainement pas l’année qui a vu sortir le plus de grosses exclus Nintendo — en tout cas jusqu’à maintenant. Mais, mais ! Il y a tout de même quelque chose à se mettre sous la dent avec Paper Mario : Origami King.
Ils sont passés assez inaperçus, mais Big N nous a déjà servi pas moins de cinq opus typés RPG avant celui-ci. Tout droit sorti du département travaux manuels (allez donc lire mes autres tests), Paper Mario met en vedette les décors en carton plié. Fidèles à la tradition de la série, les protagonistes sont des êtres bidimensionnels évoluant dans un décor en 3D. On est visuellement très proche de Color Splash sur Wii U, la principale différence étant la présence… d’origami ! Origami King
Pour les adeptes de la PCMR (ils se reconnaîtront) ou simplement ceux moins friands de moustache, la série des Paper Mario se présente comme un hybride d’action-RPG et de plate-forme. La plupart du temps, on pourra explorer le monde à la recherche d’objets-clés et d’énigmes à résoudre pour progresser dans l’intrigue. Outre les nombreux PNJ issus de la mythologie du Royaume Champignon, il y a aussi des ennemis qui se baladent et qu’on va affronter dans des combats au tour par tour.
Feuille, caillou, ciseau
Pour une fois, la princesse n’est pas capturée, mais forcée à rejoindre la troisième dimension par le biais d’un habile pliage. Scénario oblige, Mario va devoir parcourir monts et vaux pour rétablir l’ordre dans le royaume. S’ensuit une aventure des plus linéaires, mais qui traverse des environnements variés et peu répétitifs. Même si la trame est la même dans toutes les régions visitées, il faut bien reconnaître qu’elles ont chacune leur partie de gameplay spécifique.
C’est bien le côté exploration qui tient l’ennui à distance dans Origami King. Que ce soit à pied, en chaussure roulante, en sous-marin ou en canoë, chaque région amène son lot d’originalité. L’inclusion de donjons donne la possibilité de structurer certains moments du jeu. Pour inciter à fouiller dans chaque recoin, des Toads pliés sont cachés un peu partout, tout comme les boîtes secrètes ou des figurines à collectionner.
Papier prémâché
Ce qui évite à cette mouture de Paper Mario de ne pas être une copie carbone de son précurseur, c’est le système de combat. Ou plutôt ce qui vient juste avant. Précédant chaque phase d’attaque, on peut résoudre un petit puzzle chronométré qui consiste à réarranger les ennemis. Si on forme des lignes ou des carrés, le casse-tête est élucidé et on a droit à un bonus d’attaque. Au début, c’est assez amusant parce que c’est vite fait et, grâce au bonus, on peut éliminer tous les ennemis en un seul round et se faire plein de pepettes.
Plus tard dans le jeu, les puzzles deviennent plus complexes, et nécessitent parfois d’acheter du temps pour arriver au bout. On peut ainsi dépenser les pièces amassées pour recharger le chrono, au risque de dépenser plus que ce que le combat rapporte ! Les pièces servent aussi à se faire aider par les Toads vénaux qu’on aura préalablement dépliés. Selon le pactole dépensé, les hommes-champignons vont faciliter l’énigme, affaiblir les ennemis ou offrir des soins ou des objets.
Les boss, tels que la perforatrice, la boîte de crayons ou des origamis élaborés, s’affrontent un peu différemment. Cette fois, ce n’est pas Mario qui est au centre, mais l’adversaire. Il faut à ce moment réarranger les cases pour créer un chemin jusqu’à boss pour espérer l’atteindre. Bien que variés, certains combats ont tendance à traîner en longueur à cause du casse-tête à résoudre avant chaque action et de certaines animations à la lenteur pokémonesque.
Ce que j’aime dans Origami King, c’est l’absurde omniprésent. Dans de nombreuses situations, les jeux de mots à deux kopeks sont de rigueur. Les remarques d’Olivia le sidekick et son Q.I. d’huître, qui franchissent régulièrement le quatrième mur, sont d’un ridicule exquis. Avoir une population bidimensionnelle permet certaines originalités, comme utiliser un fax comme téléporteur. Et quand on y réfléchit un peu, tout est fait de papier, les gens comme les arbres et les bâtiments. Quand on bat un ennemi, il explose en confettis, qu’on peut ramasser dans un petit sac, et utiliser ensuite pour boucher un trou dans le décor. Oui, je viens de réparer une fenêtre avec des intestins. La bande sonore mérite aussi des éloges. Beaucoup de variations sur des thèmes, ce qui évite les morceaux qui tournent en boucle.
Faux pli
En revanche, là où Origami King me froisse, c’est au niveau de la pertinence des combats. Leur système au tour par tour rappelle celui des jeux de rôle plus classiques. Il y a cette pointe d’interactivité propre aux jeux de rôle made in Mario, où appuyer sur une touche au bon moment permet d’augmenter les dégâts. Jusqu’ici, tout va bien ; on s’en tient à la recette maintes fois éprouvée. Par contre, le héros ne gagne pas de niveau en combattant, uniquement du pognon. L’argent sert quasi exclusivement à acheter des objets à utiliser durant les affrontements.
En fait, l’économie du jeu ne pousse pas à chercher la bagarre, bien au contraire ! Au-delà des 20’000 pièces en poche, il n’est pas utile de gonfler davantage sa bourse. À ce moment-là, les combats, surtout ceux qui ne sont pas obligatoires, ressemblent à une perte de temps, car le bénéfice est minime. Sans compter que des tonnes de pièces sont disséminées dans le décor, qu’on déniche en explorant.
L’absence de points d’expérience — déjà blâmée dans les titres précédents (ici ou là) — combinée à l’absence aussi de membres contrôlables dans l’équipe diminuent énormément le côté stratégique du jeu. Olivia nous informe par moments que « Mario est devenu plus fort ». Le changement semble lié au nombre total de PV, qui augmente en trouvant des objets et pas en combattant. Durant certaines portions de l’aventure, on est accompagné par un second acolyte, qui peut prendre part aux combats. Malheureusement, on ne peut pas contrôler ses attaques et en plus elles foirent régulièrement. Origami King ressemble à un RPG, mais n’en est pas un. Ce n’est pas forcément une critique en soi, bien que ça implique que la finalité du jeu soit alors uniquement d’accomplir le scénario, plus que de maîtriser le gameplay et son personnage.
Pas raplapla
Cela dit, ce Paper Mario a de quoi occuper un moment, en partie à cause des centaines de trucs à ramasser. Et, mine de rien, des thèmes assez philosophiques sont même abordés, comme la création de la vie ou la mort. Hélas (ou pas), ce n’est jamais très en profondeur (NdFounet: normal pour un bidule en 2D…). On sent bien que l’équipe s’est pliée en quatre pour créer un monde surprenant et il s’en est fallu de peu pour que j’applaudisse Origami King des deux mains. Malgré ses faiblesses, il a assez de matière pour faire passer un bon moment et éviter que les efforts des développeurs ne tombent à plat.
Note: 7 chifoumis sur 10
Disponible exclusivement sur Switch