Le devin reposa le couteau et se gratta la barbichette en regardant les entrailles du lapin étalées sur la table. La prophétie s’accomplirait lorsque, dans la même année, les maux traverseraient les frontières, le taureau gaucher rattraperait la croix blanche sur le sol rouge et un illustre moustachu atteindrait l’âge de 35 ans. C’est seulement à ce moment-là uniquement que la malédiction des jeux Star Wars pourris s’interromprait. Bah, c’est pas près d’arriver, se dit-il en jetant la carcasse au feu.
On y croyait plus. Et même en maîtrisant la Force il aurait été difficile de prévoir ce retournement de situation. En guise de signe précurseur, la sortie de Jedi Fallen Order fin 2019 a ouvert le chemin de la réconciliation. Habile celui ou celle qui avait su lire les présages*. Et pourtant si! EA remet le couvert et nous sort un bon jeu de shoot spatial, sobrement intitulé Star Wars Squadrons. On le doit au studio Motive, créé pour l’occasion avec des pièces rapportées ayant œuvré sur Battlefront 2. Annoncé comme le successeur de l’ancestrale saga des X-Wing et autres TIE Fighter (1993 à 1999), le dernier arrivé s’en inspire fortement, mais lorgne également avec zèle du côté des Rogue Squadron. Un jeu à mi-chemin entre la simulation et l’arcade, c’est parfait. Emballé c’est pesé.
Jean-Luc Skywalker
Quand c’est bon, pas besoin d’en faire des caisses! Vendu 40 CHF environ, selon le cours galactique, Star Wars Squadrons est un jeu qui propose, pour une fois, exactement ce qui a été annoncé. Cerise sur le gâteau, EA semble avoir retenu la leçon et le jeu ne souffre d’aucune microtransaction. Il y a bien des éléments cosmétiques à débloquer, plutôt amusants, mais uniquement avec les crédits du jeu.
La campagne solo contient une quinzaine de missions, pour une durée de jeu tout à fait honnête. Elle sert surtout à se familiariser avec les différents chasseurs, bombardiers et vaisseaux de soutien pour pouvoir ensuite aborder sereinement le mode multijoueur. Ce dernier se divise en deux : les escarmouches à cinq contre cinq, et l’autre plus scénarisée (inspirée de Battlefield) où l’on alterne entre défense et attaque de flotte. Si le premier est un peu la foire d’empoigne du rayon laser, le second apporte un pan tactique bienvenu.
Visuellement, les aficionados qui ne jurent que par la « next-gen » risquent de faire un peu la grimace, devant les détails graphiques qui datent légèrement. Mais nous autres, gens de bon goût, resterons tout à fait satisfaits de l’ambiance Star Wars, retranscrite sans bavure. On vole dans les astéroïdes, face à des planètes plus ou moins lointaines, au travers de nébuleuses ou aux flancs de croiseurs gigantesques et c’est beau. Notons également que le fan service est très discret! À part la présence fugace d’un Wedge Antilles au début. Et l’évocation de personnages comme Iden Versio (l’héroïne de Battlefront 2), ou l’amiral Sloane (plutôt existante dans les comics), rien n’est rentré au forceps avec l’étiquette « REGARDEZ, JE SUIS STAR WARS! »
La campagne propose donc d’alterner entre des missions pour la Nouvelle République et pour l’Empire (l’action se déroule peu de temps après le Retour du Jedi). Aucun lien n’est fait avec les bouses 7 à 9, ça aussi c’est bien! On en profite pour se faire la main sur les bases du pilotage. Ainsi, on a apprend à jouer avec la répartition d’énergie entre les moteurs, les lasers et les boucliers, ou à mettre le paquet sur les déflecteurs avants, comme on dit dans le métier. Sur PC à la manette (Xbox 360), la jouabilité est impeccable. Mon coéquipier de vol, Mush, semble lui avoir plus de problèmes à manœuvrer au joystick (ou alors il est nul, mais on est pas sûr [NDZyvon: On sait la vérité, mais on a peur de la dire]).
La Marine Lepénrial
Il y a tout de même deux reproches à faire à ce p’tit gars Star Wars Squadrons.
Premièrement, le jeu est encore bien buggé, notamment en multijoueurs. Il est encore assez fréquent de perdre de longues et précieuses demi-heures jusqu’à pouvoir rejoindre correctement une partie. Et encore, c’est parfois au prix de forts ralentissements en début de vol, voire de déconnexions intempestives. J’ai également dû réinstaller le jeu sur un disque dur SSD, sinon le jeu saccade beaucoup trop.
Et deuxièmement, mais ça reste léger, on voit bien l’attention portée par EA à ajouter plus d’inclusivité dans ses jeux, via ses personnages. En soi, c’est une excellente idée. Mais le résultat est que nous nous retrouvons avec un character design évoquant plutôt les bars à fenouils de Soho que les bas-fonds de Coruscant. Et lorsque l’un des pilotes précise, un peu sorti de nulle part, qu’il est homosexuel, ce n’est pas du tout compatible avec la vision de l’Empire, qui rappelons-le, est un régime fasciste et autoritaire par excellence [NDZyvon: Fake news! L’Empire a bien sûr des amis gays!]. Il aurait été probablement plus intéressant d’en faire une figure torturée entre sa loyauté et ses sentiments. Plutôt que de donner l’impression d’avoir coché la case « inclusif » dans le cahier des charges.
Bon après, de manière générale, l’ensemble des personnages sont inintéressants et les discussions placides. On peut balayer l’entier de cet aspect pour se concentrer sur la raison pour laquelle on est là : faire pew pew pew dans l’espace en rase-motte d’un croiseur interstellaire, avant de lancer les moteurs à fond pour longer le flanc en vrille.
It’s not a trap!
Presque tous les voyants sont au vert pour Star Wars Squadrons. L’expérience de vol est grisante. Les situations de combats variées et la difficulté est habilement dosée, avec cette pointe de simulation conciliante. Il vaut son prix et ceux qui ont lu les romans X-Wing, retrouveront avec plaisir l’ambiance caractéristique. Que ce soit un galop d’essai potentiel pour le studio, le modèle économique ou le format du jeu, le résultat est concluant et encourageant pour la suite. J’ai envie de ragoût de lapin, moi.
Note : 8 Red5 sur 10
Testé sur PC. Également disponible sur Xbox One et PS4.
« Luke, votre ordinateur de visée est débranché! » Le point sur la VR
Star Wars Squadrons a clairement bénéficié d’un soin particulier pour être compatible avec pratiquement tous les appareils VR du marché. Tout Internet semble d’accord pour dire que l’immersion en est encore plus prenante. Malheureusement, le casque de la rédaction était squatté par Teiki au moment du test, pour une expérience relative à la « proximité corporelle de l’entre-gens en période de confinement » [NDTeiki: C’est que l’on fait du local chez nous, de la science de proximité]. J’ai pas tout compris, mais dès que possible nous vous donnerons notre avis.