Cris Tales, c’est un peu l’épisode de Noël du JRPG. J’y retrouve tout ce que j’aime et je me réjouis de voir ce qui va se passer.
Crisbell est une orpheline qui vit au couvent de Narim. Elle remarque un jour que son ami Mathias – une grenouille dotée de parole – a volé une rose au jardin. Au cours de sa quête florale, Crisbell se rend à la cathédrale, où elle sera touchée par le doigt du destin. Lui conférant alors des pouvoirs de mage temporel, de vêtements classes et accessoirement la désignant comme l’élue avec un grand E. Ses nouveaux pouvoirs vont permettre à Crisbell d’éviter l’avenir austère qu’elle peut désormais apercevoir et influencer le présent. Elle fait rapidement connaissance de Cristopher, lui aussi mage combattant, ayant une grosse dent contre la méchante Impératrice. Le joueur va donc suivre l’histoire des deux Cris. Hé ! C’est le titre du jeu !
Cristal, pas lasse
L’intro classique, mais efficace, de Cris Tales permet de se familiariser avec la gestion du temps – tout comme devrait le faire la rédaction de Semper Ludo – qui est un aspect central du gameplay. Dans les villes et bourgades, l’écran est séparé en trois zones dans lesquelles on voit le passé, le présent et le futur. N’importe qui de sensé utiliserait ce pouvoir pour jouer à l’Euromilion ou s’acheter un almanach des sports, mais comme tout cela n’a pas cours dans l’heroic fantasy, on se contentera d’en faire usage pour sauver le monde.
En ville, cela permet de constater que « c’était mieux avant » et que « on va pas vers le beau ». Qu’à cela ne tienne, car Crisbell a les moyens de renverser le cours des choses. C’est au joueur de se diriger vers les habitants qui ont besoin d’aide et de choisir ou non de régler leurs problèmes. Il arrive aussi qu’on doive faire le choix d’aider une personne plutôt qu’une autre, mais avec l’avantage de voir les effets que ça aura. Cet aspect du jeu implique que tous les lieux et personnages ont leur propre design pour chaque époque. Rien que ça force le respect pour ce petit studio indé (Dreams Uncorporated).
Criss de tabarnak
Les affrontements se décident au tour par tour, avec au maximum une équipe de trois pour le joueur. Crisbell peut utiliser ses pouvoirs pour décaler les ennemis dans le temps ; ceux à gauche de l’écran vont dans le passé et ceux à droite dans le futur. Si envoyer un gobelin adulte dans le futur le rend vieux et lent, ce n’est pas le cas pour un loup qui deviendra chef de meute. Au fil de l’aventure, on va rencontrer entre autres un mage qui permet d’inspecter les adversaires pour connaître leurs faiblesses et leur état passé et futur. Ou aussi un guerrier robotique qui peut déplacer les ennemis sur l’écran et donc dans le temps. Avec un peu de stratégie, on peut rapidement affaiblir un antagoniste coriace.
Chaque membre de l’équipe a ses points forts et une complémentarité avec les autres. Par exemple, Cris(topher) peut utiliser la magie de l’eau pour mouiller un adversaire métallique. Cris(bell) va ensuite le propulser dans le futur, où il sera rouillé et déglingué. Certains sortilèges naturels, impliquant des plantes qui poussent, peuvent être accélérés d’une même manière. La limite d’une équipe de trois est juste ce qu’il faut ; assez flexible pour s’adapter, mais pour autant il manque souvent la capacité d’un quatrième larron pour dominer la situation.
La direction artistique – éléments en 2D mais déplacements sur trois dimensions – permet d’apprécier pleinement les détails apportés aux décors urbains et aux personnages. Ce style « fait main » crée le pont entre l’aventure et le côté plus poétique du jeu. L’architecture est particulièrement soignée et renvoie aux origines colombiennes du studio Dreams Uncorporated. Les doublages en anglais collent bien aux personnages pour les rendre attachants. Pour finir, mention spéciale aux easter eggs, notamment Star Wars (!).
Le piège de cristal
Oui, j’aime les JRPG. Une bonne narration me permet de mieux me connecter aux protagonistes et de rendre crédibles l’aventure et les motivations de chacun. J’aime aussi quand les héros ont leur propre personnalité et qu’ils prennent leurs décisions. Le joueur est alors spectateur d’une aventure, mais doit faire en sorte qu’elle se réalise. Cris Tales puise ses idées dans les jeux de l’âge d’or du JRPG. Certains moments m’ont projeté droit dans Golden Sun, qui reste l’un de mes premiers et préférés jeux de rôle.
Malgré tout le bien que j’en dis, il existe quand même des zones d’ombres dans Cris Tales. Par exemple, certaines transitions ou animations sont réduites au minimum syndical : lors d’une rencontre aléatoire, c’est interruption de la musique et fondu au blanc. Le niveau de difficulté n’est pas trop élevé, mais certains combats de boss sont presque infaisables avec la mauvaise équipe, ou au contraire peuvent être réglés en quelques tours avec le bon combo.
Je ne peux que recommander Cris Tales qui, tout en profitant de notre nostalgie, offre un JRPG haut en couleur et à sa sauce. Pas besoin d’être grand stratège pour apprécier cette aventure qui occupe facilement une quinzaine d’heures, et un prix variant entre 20 et 40 CHF selon votre crèmerie.
9 paradoxes temporels sur 10
Testé sur PC [Steam], disponible partout (Xbox One & Series X|S et dans le Game Pass, PS4 & 5, Switch et Stadia)