On va finir par y orriver [ Ori and the Will of the Wisps, Xbox One ]

Tandis que la cadence du monde entier ralentit, nous perdons nos repères. Nous devons repenser voire réinventer, nos rythmes de vie et ça peut être perturbant. Nous ne sommes pas faits pour demeurer dans un état d’instabilité. Comme une pièce de monnaie, nous ne pouvons pas rester indéfiniment en équilibre sur la tranche. Nous finissons toujours pas tomber, d’un côté ou de l’autre. En condition de mouvement bancal, il est parfois bon de pouvoir se raccrocher à quelque chose de défini, de rassurant.

Le visage connu est celui d’Ori, petit esprit des forêts. Après avoir ramené la lumière dans son propre bois en 2015 dans The Blind Forest, Ori part faire du tourisme à dos de chouette. Mais les deux personnages se retrouvent séparés dans une contrée étrangère et hostile, qui semble atteinte du même manque de clarté. Cette nouvelle quête va donc conduire Ori sur la voie de la volonté des feux follets (Will of the Wisps). Ori and the will of the wisps

On retrouve le même concept qui a fait le succès du premier jeu. De la plateforme agrémentée de combats dynamiques. C’est la carte RPG qui est ajoutée à la famille cette fois, puisque des missions secondaires font leurs apparitions, ainsi que plus de personnages avec lesquels discuter et un arbre de progression sous forme d’amélioration à acheter. Les compétences de base se débloquent progressivement, aux détours des pérégrinations forestières. Si on passe l’aspect assez inhérent aux suites selon lequel le protagoniste perd ses pouvoirs/capacités d’un jeu à l’autre sans qu’on ne sache vraiment pourquoi, la liste des habiletés va être nettement enrichie dans ce nouvel épisode.

Ori dispose maintenant d’armes (épée, marteau, arc, etc.) ayant chacune ses propriétés, mais aussi d’autres mouvements qui permettront d’accéder à des zones jusque là inaccessibles. Je ne vous en dis pas trop pour ne pas dévoiler les subtilités de cette exploration. J’ai une petite pensée au passage pour le très bon, mais moins connu Season after fall, sorti dans l’ombre de Blind Forest et qui souffre la comparaison.

Ori and the Will of the Wisps Xbox One Personnages

Des personnages fantasques qui sortiront progressivement de leur apathie.

Lorsque l’on combine ces différentes actions de déplacement et de combat, on obtient un mélange d’une rare fluidité. Ori se propulse d’un ennemi à l’autre, porte un coup d’épée, accroche une liane, s’interrompt en plein saut pour équipe l’arc et décocher une flèche sur l’insecte géant derrière lui avant de retomber sur une limace toxique et la projeter contre les ronces. Cette sensation de glissade et de puissance est extrêmement jubilatoire. Mon article n’a d’ailleurs pas pour objectif de vous détailler le contenu du jeu : il est excellent (le jeu, pas mon article, enfin, c’est vous qui voyez). Cinq ans séparent les deux jeux et ça se voit. C’est un produit fini, léché et passionnant.

Ori and the Will of the Wisps Xbox One Progression

Je vous recommande d’acheter en priorité les compétences permettant de coller aux murs et celle du triple saut.

Promenons-nous dans les bois

Les décors sont toujours superbes. La forêt semble vivante autour de nous, il y a des petits détails partout. L’animation elle-même est organique, comme ces branches qui plient sous le poids d’Ori. La musique n’est pas en reste et s’intègre en osmose parfaite avec ce qu’il y a sur l’écran. Le compositeur Gareth Coker, déjà à l’œuvre sur Blind Forest, a mis l’Orchestre Philharmonique de Londres (rien que ça, ma gueule) a contribution pour faciliter une immersion du joueur sans effort. La mélancolie est partout. Cette forêt sur le déclin, corrompue, la morosité des personnages et des décors eux-mêmes, tout semble rappeler le manque de la lumière et de cohabitation naturelle dans cet écosystème.

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J’ai adoré Ori and the Will of the Wisps, sans aucun doute. Allez, si je dois lui trouver des petits défauts, je dirais que les décors fourmillant de détails rendent de temps en temps l’action un peu moins lisible. Comme dans certains combats de boss ou quand on se demande si c’est une plateforme ou un élément décoratif. Mais c’est rare. Si le communiqué de presse précisait que la meilleure expérience se passerait sur Xbox One X, il est vrai que sur notre Xbox One classique, l’action se freeze parfois pendant quelques secondes. Et après enquête dans notre entourage, ce problème d’optimisation est courant. Le jeu étant également disponible sur PC (play everywhere), vous pourrez en profiter sans encombre. Le jeu étant une pure production Microsoft, il figurait dès son lancement dans l’offre du Game Pass. Rien à redire.

 

ori and the will of the wisps décors

Grande nouveauté, les sauvegardes se font maintenant automatiquement et il n’est plus nécessaire d’amasser de l’énergie pour choisir quand enregistrer la partie.

Memento mori

La fluidité du premier Ori avait déjà séduit les speed runners. L’équipe de Moon Studio a donc pris les devants pour ajouter des options adaptées dans Will Smith of the Wisps. Et le spectacle vaut le détour. Néanmoins, j’ai été un peu dérangé par l’implémentation de ces passages dans lesquels il faut battre un temps record. En termes de mécaniques de jeux, c’est parfaitement logique, mais je l’ai ressenti comme une discordance (même très passagère). Ori est aussi une expérience émotionnelle forte et la manière dont on le perçoit en jouant est capitale dans le vécu en jeu.

fantôme

L’une des fameuses épreuves facultatives où il faut atteindre l’objectif avant un fantôme.

À commencer par l’attachement affectif aux personnages. Ori semble toujours très faible, comme dans le premier jeu, avant de devenir progressivement incroyablement puissant. Mais n’oublions pas la relation qui s’est développée entre lui et la chouette que j’ai évoquée précédemment. Elle qui est oisillon de l’antagoniste principale de Blind Forest, nous nous sentons responsables d’elle, tout comme Ori qui remuera ciel et terre (et marécage et grotte et etc.) pour la retrouver.

Mais je relève également une force dans le hasard des calendriers. Alors que nous vivons actuellement une période durant laquelle nous n’avons pas l’impression de pouvoir contrôler grand-chose et où notre capacité d’adaptation est mise à rude épreuve, sort un jeu où seul l’acharnement compte. On se retrouve régulièrement bloqué et perdu dans le jeu, mais en insistant on finit par dépasser l’obstacle. Ainsi, il m’est arrivé plusieurs fois de me planter à répétition sur un passage. Au point de me demander si je n’avais pas encore le bon pouvoir pour réussir cette séquence, ou si je manquais de maîtrise. Et à chaque fois que cela s’est présenté, en persévérant, j’ai fini par y arriver. Mon insistance a donc toujours été récompensée, d’une manière particulièrement agréable due à la fluidité des mécaniques de gameplay.

ori and the will of the wisps carte

La carte, un allié précieux quand on se perd. Et ça arrive souvent. L’aspect labyrinthique est à l’image de l’esprit du joueur, allant de la confusion à plus de clarté.

Ainsi, je me suis retrouvé à viser les 100 % du jeu. Quitte à devoir même farmer pour récolter suffisamment de ressources pour débloquer toutes les améliorations. Chose que je ne fais que très rarement. Et j’y suis arrivé, à ma grande satisfaction. Malheureusement, un bug connu empêche les derniers succès de se déverrouiller, à ma grande frustration. En fouillant un peu, je suis même tombé sur une communication des développeurs précisant que si quelqu’un vous dit avoir fini Will of the Wisps, il faut le croire sur parole… Providentiellement, un prochain patch devrait venir corriger ça.

poursuite

Plusieurs séquences assez épiques demandent de fuir un danger et d’enchaîner les sauts et les manœuvres avec adresse.

Ori, je, ô désespoir

Je trouve intéressant de mettre en perspective notre environnement finalement incontrôlable et un milieu fermé et maitrisable comme celui d’un jeu vidéo. Cette pratique ludique nous donne une impression de domination. Celle-ci peut s’avérer rassurante, dans un cas de pandémie, par exemple, où lutter contre un virus invisible est anxiogène. (Cette période sera d’ailleurs le théâtre d’un prochain Call of Duty: Toilet Paper Warfare). Ou plus traditionnellement lorsque l’on ne sent pas valorisé ou reconnu au quotidien.

Ori and the Will of the Wisps est une invitation au voyage splendide, mais particulièrement à l’introspection. Le ton mélancolique n’est pas le seul qui devrait nous amener à nous questionner sur ce que nous ressentons en y jouant. Mais bien le jeu dans son ensemble, formé par l’imbrication des pièces et des rouages du gameplay, de la musique et de ses graphismes.

Note : 10 🦝 sur 10

Disponible sur également sur PC (et très probablement sur Switch dans un avenir proche…).

 

Author: Founet

A ne pas confondre avec le village vaudois, est à peine plus jeune qu’une Famicom. Vouant un culte à George, il découvrit son amour du jeu vidéo et de la techno allemande pendant les grandes années de Lucas Arts. De ses nombreuses heures passées à cliquer lui vient son humour absurde et sa cleptomanie. Frappé d’une mystérieuse malédiction, les machines semblent se rebeller lorsqu’il les manipule ou fait mine de les regarder. Founet ne roule jamais en-dessous de 88 miles à l’heure et rêve de maîtriser la télékinésie grâce à la Force. En attendant de passer maître Jedi, il joue à la Wii U. Accessoirement rédacteur en chef, quand il arrive à se faire entendre des autres, qui mettent le son trop fort, les farceurs.

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