Existe-t-il un lien de corrélation entre la difficulté à prononcer le titre d’un jeu et la qualité de ce dernier ? Oui, serais-je tenté de dire après avoir poncé les trois opus de Theatrhythm Final Fantasy. Après deux excellents épisodes sortis sur 3DS en 2012 et 2014, il aura fallu attendre neuf ans pour voir le jeu de rythme de Square Enix revenir sur Switch et Playstation. Theatrhythm Final Bar Line semble bien décidé à se faire excuser pour ces longues années d’attentes avec un contenu gargantuesque.
Sans la musique de Final Fantasy, la vie serait une erreur
Autant le dire tout de suite : lorsque j’ai lancé pour la première fois Theatrhythm en 2012, je n’avais jamais joué à un seul épisode de la saga de JRPG la plus célèbre au monde. Ai-je été l’auteur d’un blasphème ? Suis-je un hérétique ? Je ne crois pas. Ce que je sais en revanche, c’est qu’il est tout à fait possible de prendre son pied sur les Theatrhythm sans être un inconditionnel des Final Fantasy. Certes, je passe sans doute à côté de nombreuses références. D’accord, je savoure probablement moins les morceaux qui n’ont pas pour moi la saveur d’une madeleine de Proust, mais qu’importe, quand la musique est bonne ! Et dire que les compositions – essentiellement de Nobuo Uematsu – sont bonnes est un euphémisme.
Facile à appréhender, difficile à maîtriser
Telle est la loi de Bushnell, et Square Enix semble bien décidé à l’illustrer par ses jeux de rythme. Le concept de Theatrythm (je ne garantis pas de l’écrire correctement à chaque fois) est on ne peut plus simple : prenez les OST des jeux Final Fantasy et balancez-les dans un jeu de rythme accessible et efficace. Accessible, parce qu’il n’existe que trois sortes de notes : celles qui s’activent par une pression de n’importe quel bouton, celles qui requièrent de maintenir la pression, et les dernières qui s’activent grâce à l’orientation d’un stick dans la direction indiquée. Efficace, parce que cette jouabilité en apparence simpliste est instantanément grisante et suffit amplement pour garantir un vrai challenge.
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Afin de coller à l’ADN de la saga (parce que oui, depuis 2012 j’ai quand même fait un Final Fantasy, le premier, même que j’en parle ici), le mode principal de Theatrhythm Final Bar Line adopte des aspects de RPG. Pour ce faire, rien de plus simple : chaque opus de la franchise représente une histoire chapitrée. Un chapitre équivaut à un morceau à accomplir en étant le plus performant possible. La subtilité dans ce mode « quête », c’est que pour être performant, il ne suffit pas de faire des « critiques » sur chaque note. En effet, il s’agit également de vaincre les mobs et les boss qui apparaissent tout au long des morceaux.
Pour être encore plus fidèle à l’esprit de la chose, chaque boss a ses faiblesses et ses résistances. Il devient alors crucial de choisir les quatre bons personnages parmi les cent quatre disponibles pour partir à l’aventure. Si ces derniers ne changent strictement rien à la jouabilité, ils possèdent tous une classe et différentes compétences à débloquer et à activer en montant de niveau. Ajoutez encore à ça la possibilité d’équiper des objets qui confèrent des bonus ou des capacités, et vous avez tous les ingrédients d’un JRPG classique réunis.
Complétionnite aiguë
Alors oui, le commun des mortels pourra se contenter de terminer les morceaux pour « accomplir » les quêtes, mais les complétistes et autres maniaques dont je fais partie viseront des morceaux réussis avec 100% de notes critiques et des objectifs de quêtes accomplis. C’est à ce moment seulement que la quête affichera le statut « complétée » et pas uniquement « terminée ». Que voulez-vous, le diable (et l’autosatisfaction des psychorigides) se cache dans les détails !
S’amuser en musique même en cas d’amusie
Rassurez-vous toutefois, les quatre niveaux de difficultés sélectionnables avant de lancer n’importe quel morceau permettront même aux personnes souffrant d’amusie de satisfaire leurs déviances complétistes. Les différents modes de jeu et le multijoueur (en local coopératif ou en ligne compétitif) offrent un contenu plus que suffisant pour promettre de très longues heures passées à chantonner tout en tentant de se surpasser.
Open Bar
On ne peut pas évoquer la durée de vie du titre sans mentionner le nombre de titres délirant que propose Theatrhythm Final Bar Line. La version de base en propose 385. Ce qui est déjà énorme. On dépasse les 500 avec les DLC compris dans la version deluxe. Si la quantité donne déjà le tournis, la qualité finit de nous assommer. L’idée géniale a été de sortir des DLC consacrés à d’autres licences de Square Enix. Outre les musiques des innombrables Final Fantasy (épisodes numérotés comme spin-off), c’est sur des titres de jeux SaGa, Live A Live, The World Ends with You, NieR, Chrono, Mana, Octopath Traveler, Xenogears que l’on peut également s’enjoyer. Square Enix oblige, c’est ici le principal point noir, tout ceci se vend à prix d’or et il ne faut pas trop miser sur des soldes dans un avenir proche.
La perfection à portée de doigts
Puisque j’évoque un point noir, il y a autre chose sur lequel j’aimerais presser, c’est l’écran de ma Switch ! L’une des grandes forces des deux premiers opus de Theatrhythm sur 3DS était leur jouabilité au stylet, ultra précise. Sachant que Theatrhythm Final Bar Line sortirait sur PlayStation et Switch, je nourrissais l’espoir de voir les développeurs nous rappeler l’existence d’un écran tactile sur la console de Nintendo. Malheureusement, le titre ne se joue qu’à la manette. La précision est peu ou prou la même lorsqu’on utilise un Pad Pro, mais en mode portable, il faut bien avouer qu’un stylet aurait été plus agréable que les JoyCon clippés à la console et l’ergonomie peu adaptée que cela offre. Un détail qui me décourage toutefois trop souvent de jouer à cet excellent titre en vadrouille, et c’est bien dommage.
Un jeu pour les gouverner tous
Pour conclure ce test, vous me verrez faire quelque chose auquel je ne suis pas habitué : prier les développeurs pour qu’ils exploitent une recette jusqu’à plus soif ! Avec ce concept, Indieszero tient une excellente base de jeu musical qui pourrait être transposée dans de nombreux univers aux identités musicales fortes. Si un Theatrhythm Dragon Quest est bel et bien sorti en 2015 (et exclusivement au Japon), on se prend à rêver d’un Theatrhythm Zelda, Soulsborne, Castlevania. Qui sait, peut-être qu’un jour Theatrhythm deviendra le Smash Bros du jeu de rythme.
Note: 9 Démons du Midi sur 10.
Testé sur Switch. Également disponible sur PS4.