C’est ton Destin(y) [Destiny 2, PS4] 

Quelque part dans les années 90, alors que je butais joyeusement du démon à coup de fusil à pompe dans Doom 2, tel l’enfant innocent que j’étais, une question cruciale me vint à l’esprit : mais pourquoi personne n’a encore fait un mix entre Doom et un RPG ? Avec du loot, un personnage qui évolue et tout le toutim ?! Une vingtaine d’années plus tard, Bungie répondra enfin à mon interrogation avec Destiny.

Mon cri désespéré avait alors apparemment résonné aux oreilles d’un petit studio créé en 1991 nommé Bungie qui finit par se lancer dans l’aventure avec le projet « Comet ». Celui-ci sortira par la suite sous le doux nom de Destiny en 2014, puis Destiny 2 en 2017. Après deux DLC, deux extensions complètes et un season pass contenant trois saisons, Destiny 2 est devenu un succès commercial qui a permis à l’équipe de Bungie de se séparer du grand méchant Activision et de reprendre son indépendance. Et bien que la qualité des différentes mises à jour ait pu aller de catastrophique à top-mega-moumoute, les résultats sont là : en juin 2019 le jeu comptait plus d’un million de joueurs par jour !

En résumé, Destiny 2 c’est un MMO-FPS-RPG dans lequel vous créez votre personnage parmi trois classes (Arcaniste, Chasseur ou Titan). Vous gagnez de l’expérience, du loot et vous vous alliez à d’autres joueurs pour dégommer des extraterrestres de plus en plus méchants dans un univers incroyablement riche et envoûtant. Et tout ça avec l’un des meilleurs gunplay du marché actuel.

Une vue splendide de la dernière cité de l’humanité. Et sinon le type bleu c’est Zavala, il n’est pas très fun en soirée.

Les multiples personnalités de Destiny : MMO ? FPS ? RPG ? Casual ? Hardcore ? PvP ? PvE ? Jambon? Tomate? Mozza?

Le développement de Destiny aura été et est encore, disons-le, un sacré bordel. Destiny 2 est un « game as a service » et vise à perdurer sur plusieurs années avec des updates réguliers. Depuis sa sortie, Destiny 2 aura donc connu 4 DLCs et 5 updates saisonniers de qualité très variable. En effet, la direction du jeu donne des fois des impressions de girouette folle tant au niveau du modèle financier, de l’équilibrage du jeu ou encore de la trame narrative. Néanmoins, il faut souligner un effort de transparence très conséquent depuis quelques temps. Luke Smith, l’actuel capitaine du navire, a ainsi récemment écrit un director’s cut nous partageant beaucoup de ses réflexions sur le processus de développement.

Autant dire que les forums dédiés sont un véritable brasier, tant pour les éruptions de hype lors de la sortie d’une nouvelle extension, que pour ses drames collectifs dignes d’un soap opera aux amphets, suite au nerf d’une arme populaire.

Bon alors, jambon-beurre ou salami-grenade ?

Au final, il est vrai que vous pouvez jouer à Destiny de différentes façons qui pourront vous apporter des expériences de jeu assez inégales. Si vous jouez de manière très casu, faites la campagne et vous arrêtez là, le jeu sera somme toute assez classique et peu motivant passé l’effet de la nouveauté. Si vous vous intéressez au End-Game et voulez commencer à grinder les armes avec les bonnes stats, accumuler les triomphes ou les titres, alors là vous pouvez directement démissionner de votre taf et devenir joueur de Destiny à plein temps, tellement il y a à faire.

Un joueur solo y trouvera également largement son compte. Mais pour certaines activités, telles que les raids ou le PvP compétitif, il est préférable, voire indispensable, de jouer avec des amis ou de trouver des collègues sur les sites communautaires de Looking For Groups (car il n’y en a pas intégré dans le jeu… ehhhh non). Néanmoins si vous le pouvez, amenez vos potes, l’expérience n’en sera que plus gratifiante. Et si vous n’en avez pas, eh bien il est toujours temps de fraterniser avec Kevin69 et KitKatD3stroyer420.

Raid is dead

De la même façon, vous pouvez vous concentrer uniquement sur la part PvE du jeu dont les activités sont très nombreuses. Les raids à six joueurs en constituant l’expérience ultime, ceux-ci peuvent d’ailleurs prendre plusieurs heures à compléter et constituent un challenge de taille. Lors de la sortie d’un nouveau raid, Bungie organise d’ailleurs une compétition avec des récompenses IRL (dans la vie qu’elle est vraie) pour les équipes gagnantes !

Bien que l’offre de mode de jeu en PvP soit plus restreinte, l’expérience en reste plus que jouissive pour peu que vous aimiez ce genre de gameplay. Avec notamment un TTK (Time To Kill : le temps que cela prend pour déboîter le gugusse d’en face) assez long, beaucoup de mobilité et de pouvoirs spéciaux qui rendent le tout très spectaculaire.

La part RPG reste encore peu développée malgré les efforts en ce sens des développeurs. Il est certes possible de customiser son personnage, son look, ses capacités, les armes et armures utilisées, mais les différences les plus conséquentes viennent surtout des flingues choisis, au final. Ce n’est donc pas un Baldur’s Gate spatial, néanmoins cet aspect s’intègre bien dans le jeu et on se prend tout de même à vouloir peaufiner son personnage.

Le retour de l’enfant prodigue

La saison 10 qui pointe le bout de son nez va d’ailleurs ramener le mode PvP favori de Destiny 1 : le Jugement d’Osiris. Sorte de ligue compétitive 3v3 qui est disponible chaque week-end et récompense avec du loot spécifique et très convoité pour ceux qui arrivent à gagner quelques matchs. Le but suprême étant d’aligner neuf victoires pour atteindre les récompenses ultimes, telles les ornements qui feront briller votre armure de mille feux.

Lui c’est Shaxx (sur la droite) le responsable du PvP. Il est clairement beaucoup plus fun en soirée.

 

Ça, c’est mon flingue intergalactique, il y en a beaucoup comme ça, mais lui c’est le mien.

S’il y a un élément à retenir du jeu, sa quintessence, sa signature, ce qui le démarque de toute la concurrence, c’est son gunplay. Chaque arme du jeu possède un feeling différent, que ce soit le pattern de recul, le son des tirs ou du rechargement, le look évidemment. Le feedback de l’utilisation des armes est simplement fantastique. On se surprend à savourer le maniement d’un flingue juste parce que le feeling est jouissif. Et c’est d’autant plus impressionnant lorsqu’on pense au nombre d’armes différentes présentes dans le jeu. Il en va de même pour chacune des armes dites exotiques (entendez uniques) qui ont toute une histoire, un look et un feeling très spécifique.

Destiny ça te gâche tous tes prochains FPS, rien n’a le même goût, rien n’a le même feeling (NdR : Teiki, il y a un Monsieur Doom qui aimerait te parler à la réception). Rien ne fait ressentir de manière aussi viscérale le moment où ton tir fait mouche en plein dans la tête de Bibi en face. C’est clairement addictif et c’est LE point fort du jeu pour moi et pour beaucoup d’autres joueurs (NDZyvon: Founet, tu nous avais caché que le noob était membre de la NRA…).

Gun qui roll n’amasse pas mousse

Cette variété du gunplay devient quasi vertigineuse lorsque l’on réalise que le feeling des armes peut vraiment changer suivant quel roll (attributs tirés au hasard lorsque vous obtenez l’arme) vous avez sur la même arme. Un peu plus d’assistance de visée, une modification du recul, du temps de rechargement ou encore du viseur peuvent complètement changer l’expérience de jeu. Et Destiny c’est aussi (surtout?) ça : la quête de SON gun, avec LE roll, celui qui vous fait mousser à chaque fois que vous faites un headshot en PvP. En résumé, si vous êtes sensibles à ces aspects de gunplay et de grind de loot, alors l’expérience risque de devenir aussi addictive que le chips au Paprika, voire même que les films de Pierre Richard en VR.

Le loot dans Destiny, c’est comme les épisodes de Joséphine Ange-Gardien, on en veut toujours plus.

Père Castor, raconte-moi un univers étendu

À quelques exceptions près, vous ne vous relèverez pas la nuit parce que l’histoire palpitante de Destiny vous aura tenu en haleine. La mise en scène est en général très ringarde et convenue dans sa narration, digne de bons nanards hollywoodiens. Les personnages, certains étant pourtant très charismatiques et attachants, paraissent trop légers et peinent à montrer leur complexité dans le peu de dialogues qui parsèment la campagne. Mais bien que Destiny ait toutes les apparences d’un film de série b intergalactique de seconde zone, il existe pourtant l’équivalent de livres entiers portant sur le lore du jeu. A mon humble avis, ceux-ci font de Destiny un des univers de science-fiction les plus captivants du monde des jeux vidéo.

Plusieurs livres, tel que le Book of Sorrow, sont même sortis en édition physique avec des illustrations magnifiques et une qualité d’écriture qui vaut le détour (en anglais en tout cas). Il est amusant de noter que si le monde de Destiny, surtout le 2e opus, paraît de prime abord assez léger et visuellement dans des tons chauds, l’univers étendu dépeint au contraire un univers très sombre, quasi Lovecraftien par moments et d’une profondeur étonnante.

Un univers tellement étendu qu’on le perd de vue

Si je suis un fan de premier ordre de l’univers créé par les écrivains de l’équipe de Bungie, il reste absolument déplorable que ce monde ne soit pas plus exposé et exploité dans le jeu lui-même. Il arrive très souvent que dans une mise à jour, les dévs incluent de puissants clins d’œil à l’univers étendu, certaines fois d’une grande finesse, ou encore de nouveaux éléments donnant des détails croustillants sur le passé d’un personnage. Mais ces détails passent souvent inaperçus pour le 90 % des joueurs qui ne zonent pas sur le subreddit dédié pour acquérir des informations supplémentaires que le jeu ne fournit pas aux vilains casus.

Vous trouverez même des spécialistes de cet univers étendu : @Myelingames et @MyNameIsByf pour ne pas les nommer. Je recommande fortement la vidéo de 4 heures (!) qui résume toute l’histoire de Destiny par Byf, et tout le contenu de ces deux bonshommes en général. Dans l’ensemble, si l’on prend le temps de fouiller un peu, la découverte de cet univers est un vrai plaisir et participera pour beaucoup au goût de reviens-y.

Boire du thé sur la Lune, vous en avez rêvé, Destiny l’a fait pour vous.

La guerre, c’est mieux à deux (millions)

Il y a fort à parier que si la communauté de Destiny s’alliait pour résoudre des problèmes scientifiques en échange de loot, nous aurions un vaccin contre le cancer et des autoroutes sur Mars d’ici le mois prochain.

Récemment par exemple, @Gladd, streamer connu dans la communauté de Destiny pour ses prouesses en PvE, a passé des jours entiers avec l’aide de ses spectateurs à bosser sur un événement communautaire. Celui-ci a nécessité l’effort commun de milliers de joueurs, des feuilles de calcul Excel titanesques, de centaines d’heures de réflexions et bien sûr de volontaires (les streamers en général) pour coordonner le tout. À noter que le streamer en question a tout de même fini par se scotcher des chaussures sur la tête devant caméra après un nombre d’heures de live outrageux.

Bungie a donc pris l’habitude de proposer des puzzles-défis-challenges communautaires allant d’un grind commun gargantuesque de 9 777 777 000 slips interstellaires (le chiffre est véridique, l’unité probablement moins) à la résolution d’énigmes assez complexes pour servir d’examen d’entrée pour la Mensa. Et le résultat de l’investissement communautaire est bluffant et grisant si l’on se prend au jeu : l’effervescence sur les différents réseaux sociaux (principalement Twitter et Reddit) est complètement dingue ! Même si, il faut l’admettre, les récompenses laissent parfois à désirer et ont pu provoquer des tollés sur Reddit dignes de la Révolution française.

Destiny, catalyseur créatif et collaboratif ?

Le plus impressionnant est la faculté de ce jeu à catalyser les vocations. Je ne compte plus le nombre de streamer, dessinateur/trice, créateur en général ou joueur pro que j’ai vu grandir et percer en débutant sur Destiny ou Destiny 2. La Guardian Con, un événement caritatif créé par des streamers dédié initialement uniquement à Destiny et a récolté quelques 3.7 millions de dollars en 2019 (l’événement s’est maintenant étendu à d’autres jeux) ! Et l’excellent boulot des community managers n’y est d’ailleurs probablement pas pour rien : @A_dmg04, @Deej_BNG et @Cozmo23 (et @Epyonzilla pour la communauté francophone).

Malgré tout si l’expérience sociale est extraordinaire, l’implémentation souffre du même problème que l’univers étendu évoqué avant : si vous ne vivez pas sur Reddit, Youtube, Twitter ou Twitch, vous ne saurez probablement même pas en quoi consiste l’événement et vous allez complètement passer à côté de toute cette facette du jeu.

Un peu de poésie dans ce monde de brutes : la direction artistique du jeu est phénoménale.

Eh Manu, tu descends ?

Deux ans et demi après sa sortie, où en est Destiny 2 ? Le jeu étant passé récemment en free-to-play, il n’y a aucune raison de ne pas tenter l’aventure. Fort est à parier que s’il vous accroche, vous en redemanderez, sinon vous risquez de rester assez indifférent à cet univers qui peine beaucoup à se dévoiler. L’expérience PC est largement à privilégier si vous en avez les moyens. Le jeu étant un véritable régal pour les yeux et apportant un gameplay encore plus fluide et plaisant que sur console, notamment par la possibilité de tourner à plus de 30 fps, avec un field of view bien plus élevé et une maniabilité améliorée avec le duo clavier/souris.

De plus, Bungie a récemment ajouté le cross-save entre les différentes plateformes, vous permettant de passer de l’une à l’autre très facilement. D’un point de vue technique, si le jeu reste très beau, il accuse sévèrement le coup au niveau de l’optimisation : les temps de chargements par exemples peuvent être interminables (surtout sur console) et sont malheureusement très récurrents.

En bref, si vous aimez la science-fiction, tirer sur des méchants aliens, collecter du loot en masse, jouer à la Barbie futuriste avec votre perso pour avoir la plus belle armure de la galaxie, s’allier à d’autres joueurs pour tenter de tuer des anciens dieux intergalactiques ou encore que l’idée de spammer des emotes débiles dans les espaces publics vous séduit…. Alors Destiny 2 vaut carrément la peine. Et ça tombe bien, la prochaine mise à jour, La Saison des Dignes, débute le 10 Mars!

Destiny c’est mon addiction vidéoludique des cinq dernières années, malgré tous ses défauts et ses errements.

Note : 8 sorciers de l’espace sur 10.

Disponible également sur PC et Xbox One.

Author: Teiki

Recrue la plus prolifique du mercato du marché suisse romand du jeu de mots à 5 syllabes, Teiki (El Matador pour les intimes) est LE nouveau ancien rédacteur de Semper Ludo. Il gravit vite les échelons et grâce à quelques coups de langue bien placé, le voilà déjà en train de remplacer Founet à l’animation de Podcast. Son talent de marchandage s’est créé tôt dans sa jeunesse où il devint un pilier de l’échange d’objet inutile dans Everquest. C’est certainement cet événement qui l’oblige inlassablement à jouer à des jeux avec du loot vert, bleu, violet et orange. Ancien champion de pétanque sans cochonnet, lors d’un accident de roulade, il dû se reconvertir à la randonnée avec les pieds. Son corps est un temple où seules les personnes qui ont enlevé leurs chaussures peuvent entrer.

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