Mon tour est venu. J’ai prétexté mon éducation toute helvétique pour laisser humblement la priorité à Jorris, Gary et leurs articles, pour me barrer en réalité me la couler douce en Sardaigne. Maintenant qu’ils ont presque tout publié et que la température n’est de loin plus celle des plages italiennes, c’est à moi de m’y coller et de vous raconter ma Gamescom. On va donc commencer par un baptême du feu qui nous attendait au tournant depuis bien longtemps: un rendez-vous de présentation pour Farming Simulator. Suivi de près par Project Motor Racing.
Pour poser un peu le contexte, c’est un « running gag » entre nous depuis des années, on se lance le défi d’aller assister à une présentation de Farming Simulator, ou de passer sur leur stand public qui s’impose fièrement en exposant régulièrement des machines agricoles tailles réelles (cette année, ils avaient le plus gros tracteur existant en Europe et je ne l’ai même pas vu). Quel élitisme snob ces journalistes! En plus, c’est un jeu suisse, rappelons-le, qui se moissonne par champs entiers à chaque nouvel épisode. Les métaphores agricoles vont être un peu foireuses, je le sens. C’est donc en 2025 que la rencontre aura finalement eu lieu et je me suis pointé avec un grand sourire candide chez Giants Software. L’impression que j’allais passer comme un rite de passage ou un adoubement.
Farming Simulator 25: Highlands Fishing
« Il me reste un rendez-vous, mais en allemand », m’avait aimablement prévenu la responsable presse de chez Plaion. J’avais accepté, fier de mon origine bilingue, un peu comme le Capitaine Benjamin L. Willard à qui on demanderait de retrouver le Colonel Kurtz dans la jungle. Juste le temps de reconnecter mes neurones sur la fréquence de Deutsch mit Victor et me voilà plongé dans les joies de la pêche en Écossé. Ça commence à être compliqué à suivre? On va se mettre au vert ça nous fera du bien.
Trêve d’introduction dans l’introduction, j’étais là pour qu’on me parle de Highlands Fishing, DLC pour Farming Simulator 25. Si le concept de ce jeu de simulation d’exploitation agricole a fait ricaner pendant des années, là on ne rigole plus du tout. Le jeu cartonne, il est pointu, réalisé aux petits oignons (bio) et il existe même des compétitions e-sportives à travers le monde. La reconnaissance n’est plus à faire, pourtant la licence continue d’être toisée de haut, à tort.
Vous ne l’avez pas dans l’ordre, parce que c’est mon premier article de cette année, mais en réalité ce rendez-vous est arrivé le dernier jour de ma Gamescom. J’accusais donc le coup de trois jours de déambulations musclées et comme Snowrunner en 2019, cette présentation a eu un effet très apaisant sur moi (jusqu’à un incident dont je vous parlerais plus loin. Captation de l’attention. Technique marketing. Abonnez-vous). J’avais de quoi être sceptique pour le côté pêche, qui reste l’une des activités les plus barbantes dans l’histoire des jeux vidéo, en général. Mais là, on parle autant de pêche à la ligne que de pisciculture. Le choix de l’Écosse et sa nature rugueuse comme théâtre des opérations participent à un certain sentiment de sérénité qui émanait de cette démo.
Anglicane à pêche
En plus de rouler à gauche, les cultures, les élevages de poissons, mais aussi de mammifères et les paysages seront propres à ce qui se fait au pays de Sean Connery et Andy Murray. C’est la première fois que des bateaux sont intégrés et pilotables, mais c’est surtout la modélisation de l’eau qui a été améliorée, en y ajoutant des vagues et la gestion de l’inertie. On nous a fait la démonstration d’un appontage d’un navire équipé d’un bras mécanique pour décharger une cargaison. Déplacer ce bras demandait des mouvements de souris gigantesques, mais on peut heureusement automatiser la manœuvre.
La limite entre la simulation et la contrainte forcée est parfois tenue dans ce genre de jeu. Je pense que c’est aussi pour ça que le gestionnaire marketing Wolfgang Ebert a tenu à nous montrer l’intégration du quad et son pilotage à toute berzingue. Ce véhicule, comme les autres, permet de se déplacer librement et de rejoindre n’importe quel plan d’eau pour y planter sa canne à pêche.
Contre toute attente vu ce que j’évoquais concernant les mécaniques de pêche, Giant Software semble avoir réussi l’exploit de rendre ça plaisant en misant sur un rôle actif et dynamique, sous la forme d’un mini-jeu où il faut essayer de maintenir le curseur de sa souris parallèle à l’indicateur du poisson. Sur quatre tentatives, trois se sont soldées par le retrait d’un pneu de l’eau, mais avant que j’aie pu tenter un sarcastique « Auriez-vous projeté de mettre des poissons dans votre jeu à poissons? », voilà qu’une magnifique truite arc-en-ciel apparaît au bout de la ligne pour me rendre muet comme une carpe. Vu la dose de contenu ajouté par un DLC, Giant Software ne se moque pas de ses clients. Puis l’agriculteur range sa salopette et enfile un casque et une tenue de pilote. Changement d’ambiance pour parler de Project Motor Racing ci-dessous.
Farming Simulator 25: Highlands Fishing sera disponible à partir du 4 novembre pour un peu moins de 30 CHF sur PC, Mac, PS5 et Xbox Series X|S.
Project Motor Racing
Changement de casquette aussi pour Giants Software qui passe de développeur à éditeur pour sortir Project Motor Racing. Le producteur de Straight4, studio derrière le projet, se joint à nous et le drame que j’évoquais précédemment n’allait plus tarder à arriver. Mon sourire honnêtement attendri par les bovins écossais allait céder sa place à une moue renfrognée, mais d’abord à l’étonnement impressionné. C’est donc un studio tout jeune, regroupant des spécialistes de la simulation automobile (GTR, Project Cars,…), qui se lance dans leur projet perso impliquant une septantaine de voitures.
Project Motor Racing est en toute logique un jeu de courses, se déroulant uniquement sur des circuits existant réellement, dans dix-huit endroits différents. La localisation des pistes et leur modélisation impliquent d’ailleurs des critères comme la météo dynamique et le climat propre à chaque lieu. On est dans de la simulation pure, avec un bitume qui réagit selon les conditions environnementales (mouillé sous la pluie, puis progressivement sec). L’état des pneus est à prendre en compte, avec notamment la surchauffe des freins qui peut les endommager. J’ai beaucoup aimé l’utilisation de l’expression allemande « Gummiwurm » pour décrire les résidus de caoutchouc et leur impact sur l’adhérence.
Straight4 ont créé leur propre moteur de simulation, dont notamment le moteur physique. Vu l’enthousiasme confiant du producteur, ils n’en sont pas peu fiers. En effet, pour avoir pu tester manette en main ensuite, on perçoit la passion intégrée dans ce travail de précision.
Puis soudain, c’est le drame (comme disait la voix off à l’époque dans La nuit des héros). J’installe une ambiance et je vous laisse reprendre votre souffle. Tandis que les échanges sont cordiaux dans cette petite salle calme, voilà que débarquent deux journalistes influenceurs allemands, en retard, qui se mettent à parler très fort, par-dessus le discours du producteur passionné. Ce dernier essaie tant bien que mal de m’expliquer que le jeu est pensé pour être moddé par la suite, qu’il sera cross-plateforme et qu’un mode survie mettra à rude épreuve les nerfs des pilotes puisqu’on ne pourra pas y recommencer une course. Respect à lui qui ne s’est pas laissé trop distraire, malgré le deuxième influenceur qui engloutissait goulûment tous les petits sandwichs et les chocolats laissés à disposition sur la table.

Un cadre de présentation plaisant, propre à l’enthousiasme, perturbée par une faim dévorante.
Dissimulation
Project Motor Racing (tout comme Farming Simulator dans son registre) s’adresse à une catégorie de joueurs et de joueuses bien particulière. Je sais que ce n’est pas vraiment mon registre d’intérêt, mais j’ai toujours beaucoup de respect pour ceux et celles qui peuvent s’investir dans la simulation de la sorte. Je suis donc convaincu qu’il faudra garder à l’oeil ce nouveau venu dans le monde de la course automobile.
J’ai bien fait monter la saucer avec cet incident (Netflix m’a contacté pour les droits de l’histoire), mais c’est aussi l’occasion de rappeler que la Gamescom est aussi peuplée de gens qui sont là pour collecter des goodies et se comportent telles des divas. Comme si les nombres de clics et de vues les dispensaient de bienséance. Ce serait trop long de vous raconter comment, mais par la suite j’ai découvert ces deux mêmes énergumènes pris en flagrant délit de hurlements sur le stand de Capcom pour obtenir des t-shirts. C’est aussi ça l’éducation à l’esprit critique: savoir s’intéresser aux autres, leurs passions et retranscrire une impression, pas une course à celui qui ramènera le plus de produits dérivés gratos à la maison. J’en parlais justement à la radio durant mes vacances. Boucle bouclée, comme un tour de circuit. Rholala, je suis en forme.
Sortie prévue le 25 novembre sur PC, PS5 et Xbox Series X|S.
Retrouvez l’ensemble de nos articles concernant la Gamescom ici.