De temps à autre, on entend parler d’une révolution du PC, de nouveaux acteurs qui viennent avec de belles idées mais trop souvent refrénées par l’avancée technologique. On attend, par exemple, depuis plusieurs années la venue d’une sorte de fantasme, celui de posséder une machine virtuelle capable de streamer des jeux et logiciels sans aucun ralentissement ni perte de performance. Un simple fantasme, on vous dit. Enfin…
… Ça, ça dépendra du Shadow. Découvert sur les stands “tech” de la Gamescom, le Shadow est un tout petit boitier qui a la particularité de constituer la pointe émergente d’un ordinateur haut de gamme placé dans le cloud. Après l’avoir branché sur un périphérique, il suffit de l’allumer, d’ouvrir sa session Shadow et c’est tout. Tous les composants d’un ordinateur classique sont ainsi disposés dans un gigantesque serveur qui alimente le Shadow à travers une connexion internet, donnant naissance à un ordinateur haut de gamme situé dans le cloud. Comme pour les autres solutions de cloud gaming, tout le processing est fait dans un serveur distant et l’image générée est streamée à l’utilisateur. L’entreprise française Blade, créée en 2015, a pour volonté de produire un PC virtuel qui offre tout le confort d’une tour normale, sans avoir à acheter quoique ce soit. Un service par abonnement (29.95€/mois) et de location du Shadow est déjà mis en place en bêta et semble fonctionner à merveille. Shadow se différencie du PSNow ou de GameFly en ne proposant pas une solution uniquement destinée au gaming, mais un ordinateur Windows 10 complet. Ainsi, avec le prix de l’abonnement, aucun software n’est offert; à vous d’installer vos propres jeux.
Sur le stand, c’est l’ami Bruno qui nous a fait une démonstration de l’ensemble du système Shadow et ce qu’on peut en dire, c’est que c’est très impressionnant. Tout d’abord, le boitier en question dispose d’une belle connectique en tout genre, sachant qu’il n’est pas indispensable au bon fonctionnement du système. Pour expliquer en détail, Bruno nous a tout d’abord montré un jeu (Rise of The Tomb Raider) en 1080p, ou en 4k si l’écran est compatible, tourné non pas par l’ordinateur présent, mais par une machine dotée d’une GTX1070/1080 planquée dans un serveur en France et transmis par le cloud à travers le boitier Shadow. Il s’est ensuite déconnecté de sa session Shadow avant de se reconnecter sur son smartphone, sans le boitier cette fois, d’ouvrir sa session Shadow et de reprendre exactement là où il en était dans le jeu, sans aucune interférence, transition ou ralentissement. On a donc pu voir Rise of The Tomb Raider en 1080p sur un smartphone. La démonstration s’est conclue sur un vieux laptop à bout de souffle qui n’a absolument pas bronché et a affiché le jeu de manière fluide et sans problème. Un véritable tour de force. Le seul effort que doit faire la machine locale est de décoder l’image envoyée par le serveur Shadow, une tâche facilement réalisée par nos appareils modernes. Seuls les micro-ordinateurs pourraient encore peiner face à ce travail.
S’il existe une crainte accompagnant l’idée du cloud gaming, c’est bien la latence, c’est-à-dire le temps écoulé entre une entrée du joueur et une réaction sur son l’écran. Dans un cas normal, notre input est transféré à notre machine qui calcule une image et nous l’affiche à l’écran, un processus relativement rapide. Dans le cas de Shadow, l’input, une fois arrivé au boitier, doit voyager jusqu’au serveur pour être traité et l’image résultante doit encore être compressée pour être renvoyée chez nous, avant d’être décompressée et enfin affichée. Un processus naturellement plus long. Malgré tout, nous n’avons pas perçu de latence remarquable et avions la sensation de jouer en local, une réelle réussite pour les Français. Il s’agit maintenant de tester ceci chez nous, dans un environnement non contrôlé, pour nous assurer de cette qualité.
Il faut dire que derrière le Shadow se cache une grosse équipe compétente de plus de 50 employés qui vient d’ouvrir un bureau à Palo Alto. De quoi anticiper l’avenir et se préparer à une vague de demandes constantes si tant est que le Shadow arrive à percer la barrière fatidique du grand public, non connaisseur et attaché à l’achat matériel. L’idée est pourtant extraordinairement séduisante: disposer d’un service sur tous ses appareils grâce à une seule application et ce même avec une connexion internet variable, bien que ce dernier point reste toujours la cheville branlante du système. Mais au vu de la démonstration effectuée et de la connexion WiFi de la Gamescom, il semble que le Shadow tourne au poil et on a hâte de le tester dans différentes conditions. En cas de problème, Blade a également mis en place une assistance 24/24 et 7j/7 avec remplacement du Shadow en moins d’une semaine afin de garantir à l’utilisateur une continuité dans son expérience.
Quid des autres utilisateurs ? Ceux qui, au final, voudraient aussi utiliser cette solution comme ordinateur de bureau ? Shadow est tout à fait capable de remplir cette tâche. Des soucis surviendraient si l’on désire continuer à utiliser son ordinateur local en parallèle et se servir de Shadow comme d’une machine virtuelle. Même si l’implémentation est en route, le service ne propose pas encore de transférer facilement des fichiers entre le cloud et sa machine, une plaie si on se retrouve souvent sans connexion. Il faut aussi garder à l’esprit qu’il s’agit de deux ordinateurs distincts malgré le fait que l’accès y soit fait depuis un seul écran. De ce fait, une licence de programme valable pour un seul ordinateur ne pourra donc pas être déployée sur les deux machines.
L’intérêt d’un tel produit capable de streamer sur son propre écran une action réalisée à plusieurs centaines ou milliers de kilomètres de là consiste à s’affranchir du hardware et ainsi ne plus avoir à le mettre à jour régulièrement pour profiter des dernières technologies. L’upgrade est assurée par Blade qui ne devrait pas augmenter les prix de l’abonnement en conséquence. De quoi satisfaire les gros joueurs toujours à la pointe au niveau matériel. Shadow a le mérite de nous faire nous demander s’il n’est pas la bonne solution pour nous. Il faut simplement bien réfléchir à l’utilisation qu’on en ferait avant de se lancer.