Avant-propos
Le fleuron français de la production vidéoludique traverse en ce moment une période tumultueuse sur le plan éthique. En effet, à la suite de la publication de révélations fracassantes sur les conditions de travail au sein des différents studios à travers le monde (série d’articles dans Libération, dont celui-ci du 10 juillet), Ubisoft vient tout juste de communiquer le licenciement/départ de trois têtes de sa hiérarchie.
C’est dans ce contexte, soutenu par une vague massive de témoignages d'(ex-)employé.es sur les réseaux sociaux, qu’Ubisoft a diffusé ce soir sa « conférence » UbiForward, prévue depuis plusieurs semaines en guise de remplacement des annonces qui auraient dû être faites à l’E3. Annulé en juin pour cause de Covid, le salon marque d’habitude le grand rendez-vous des sorties à venir.
— Ubisoft (@Ubisoft) July 12, 2020
Mais c’est également durant ces derniers jours qu’Ubisoft a proposé à quelques journalistes triés sur le volet de pouvoir tester, en avant-première, trois heures de jeu du prochain Assassin’s Creed Valhalla. Grâce à l’aimable collaboration des copains de Joypad.ch, nous avons pu traduire leur compte rendu.
À n’en point douter, Ubisoft vendra des palettes de ce nouvel Assassin’s Creed, indépendamment de ces révélations tragiques. Pourtant, il nous paraît important de pouvoir se faire un avis sur un jeu et surtout de communiquer de plus en plus sur les conditions de travail dans lesquelles sont produits les objets de notre loisir favori. Ce n’est qu’en se faisant une idée claire que le consommateur peut agir de manière éclairée. Pensez-y.
— Founet
Assassin’s Creed Valhalla – Avant-première
Cela fait presque deux ans que le dernier Assassin’s Creed, Odyssey, a été publié. Un jeu qui a poursuivi l’effort de renouveau en profondeur de la saga, commencé avec Origins (2017).
Valhalla représente alors la troisième étape dans la démarche d’Ubisoft pour se débarrasser des limites imposées par des années de sorties répétitives, et ainsi faire évoluer l’une de ses franchises les plus célèbres et rentables.
Assassin’s Creed Valhalla poursuit ce processus, en corrigeant certaines des critiques des deux derniers chapitres, notamment en ce qui concerne le cœur et l’âme du jeu : le fait d’être des assassins.
Trois heures en compagnie d’Eivor
Le protagoniste de ce nouvel opus s’appelle Eivor (même s’il est possible d’opter pour un personnage féminin également). C’est un jeune Viking norvégien qui a quitté les rivages de sa patrie pour chercher fortune dans les terres du sud de la Grande-Bretagne, au IXe siècle après J.-C. Une fois arrivé à destination, il fonde une nouvelle colonie, mais il sera bientôt happé par les affaires géopolitiques de sa terre d’adoption.
À ce stade, nous ne sommes pas au courant de la manière dont Eivor a été impliqué dans les événements de la démo à laquelle nous avons joué. En revanche, ce que nous savons, c’est qu’à un moment donné, il entrera en contact avec la confrérie des assassins, obtenant ainsi de leur part une lame cachée. Mais il s’agit encore d’une information un peu lacunaire, dont nous découvrirons les tenants et aboutissants dans la version finale du jeu et qui n’est pas le sujet de notre aperçu.
D’un point de vue pratique, notre démo se situait dans la région d’East Anglia, une petite partie seulement de l’univers du jeu, auquel nous pourrons accéder à la sortie. Nous avions à notre disposition une mission de l’histoire principale, quelques raids, trois zones de synchronisation de l’Animus, quelques combats d’arène, quelques puzzles environnementaux, des zones à conquérir, des secrets à découvrir, des mini-jeux idiots (comme des concours de boisson et des défis d’insultes). Des activités que nous avons presque pu entièrement explorer durant les trois heures disponibles chez Ubisoft et qui nous ont donné un bon aperçu de ce que proposer le jeu au final.
Du nouveau !
Notre jeu a débuté par une mission de la campagne principale, où nous devions nous assurer qu’un certain Rued ne devienne pas le roi d’East Anglia. Eivor et son partenaire Finnr avaient cependant un problème : un manque évident de combattants capables d’attaquer la forteresse de Rued. Et ainsi libérer Oswald, le jeune homme choisi par Finnr comme chef de la région (nous ne connaissons pas les circonstances qui ont conduit à cette situation, car la mission « Rising Iron » de la démo ne se déroule pas au début du jeu).
Assassin’s Creed Valhalla s’ouvrait avec deux hommes à cheval, dans un décor qui ressemble beaucoup à celui de The Witcher 3. Nous avons ensuite été introduits aux nouveaux systèmes de combat et de gestion de la vie. Le combat dans Valhalla est basé sur un concept d’armes à une ou deux mains et d’attaques faibles ou lourdes. Eivor dispose de deux espaces attribuables, un pour chaque main. Armé d’une hache à une main et d’un bouclier, notre première rencontre nous opposait à deux adversaires. Un style peut-être peu efficace, et pourtant bien équilibré, en permettant d’alterner des mouvements rapides ou lourds et de parer les attaques ennemies avec le bouclier.
Il est possible de changer pour une hache dans chaque main à sa guise, d’une simple pression sur un bouton. Le principe fonctionne également avec le bouclier. Il sera aussi utilisable comme une arme bien que, comme vous pouvez facilement l’imaginer, elle ne donnera pas lieu à des attaques particulièrement dévastatrices. Il est aussi possible d’abandonner toute prudence et d’utiliser des armes à deux mains : plus lentes, plus lourdes, mais avec un potentiel offensif nettement plus élevé.
Le joueur a le libre choix de l’approche qu’il préfère. Pour nous, notre préférence s’est rapidement portée sur la combinaison hache et bouclier, plutôt que les armes à deux mains qui nous laissent vraiment trop exposés. Bien entendu, un bouton est dédié à l’esquive et d’autres armes permettent des combinaisons intéressantes, comme différents types d’arc. Mais ces derniers n’étaient pas faciles à utiliser en raison du système utilisé par Ubisoft lors de cet aperçu, qui permettait de filtrer un peu l’input lag. Viser précisément quand les commandes ne sont pas parfaitement alignées avec nos mouvements est complexe, mais ne sera certainement pas un problème dans le jeu final.
Une autre nouveauté de Valhalla est la gestion de la vie du protagoniste. Elle ne se recharge plus automatiquement avec le temps, mais il faudra consommer de la nourriture, que nous pouvons ramasser à la fois dans les buissons et dans les caisses à butin. Voire même en se la procurant directement, par exemple en pêchant au bord des cours d’eau. Ce n’est certainement pas une nouveauté révolutionnaire dans le monde des jeux vidéo, mais c’est un ajout intéressant à la série qui, historiquement, n’a jamais proposé de mécanique similaire.
Enfin, la gestion du développement des compétences en jeu a été considérablement élargie. En ouvrant le menu, nous trouverons des pages consacrées à ces compétences, à l’inventaire, à la carte et à la quête. Les deux dernières sont explicites et n’ont pas besoin d’être décrites. Dans « Skills », différents pouvoirs pourront être débloqués en trouvant des « Livres de la connaissance » à la fin de raids, ou dans des endroits secrets. Les compétences sont alors réparties entre le combat à distance et la mêlée : des mouvements spéciaux extrêmement utiles en combat que l’on peut attribuer aux touches A, B, X et Y de la manette Xbox One (et équivalant sur PlayStation 4).
Si cette mécanique avait déjà été introduite dans la série par le passé, c’est l’un des systèmes choisis par Ubisoft pour personnaliser l’expérience. L’utilisation des mouvements spéciaux nécessite cependant une certaine quantité d’adrénaline qu’il faudra recharger en combat, de sorte qu’on ne peut pas donner des coups de pied et lancer des haches à tort et à travers.
C’est dans la section des compétences que nous trouverons la plupart des options de personnalisation. Valhalla propose un système d’arbre d’amélioration basé sur trois catégories principales, qui correspondent approximativement aux compétences d’Assassin, de Guerrier et de Chasseur. Chacune de ces branches se caractérise par des compétences principales et secondaires, souvent passives, qu’il faut débloquer en séquence jusqu’à certaines intersections où l’on peut privilégier un aspect plutôt qu’un autre. Par exemple, dans la voie des guerriers, l’un des avantages principaux est l’augmentation des créneaux d’adrénaline, ce qui nous permettra d’améliorer nos compétences en attaque de mêlée. Et ainsi ouvrir la voie à l’amélioration du bonus d’armure dans les attaques rapprochées. Qui ouvrira à son tour trois nouvelles voies, dont, par exemple, l’amélioration de la capacité à lancer des haches danoises.
Le degré de personnalisation est assez élevé et il devrait y avoir de réelles possibilités de développer les compétences d’Eivor, en fonction de nos préférences en matière de combat. Nous avons opté pour la manière forte dans la démo, mais nous aurions pu nous concentrer davantage sur la furtivité et l’assassinat…
Assassin’s Creed reste Assassin’s Creed
Malgré tous les changements et les modifications, Valhalla reste profondément un Assassin’s Creed de la nouvelle génération. Nous y trouverons des éléments très familiers tels que le monde ouvert, les missions principales et secondaires, les secrets, l’utilisation de l’aigle pour observer le territoire ennemi à distance de sécurité (mais cette fois, c’est un corbeau !). Valhalla, comme nous l’avons dit ci-dessus, fait plutôt avancer la conversion de la série du jeu d’action-aventure au jeu d’action-RPG, en approfondissant les aspects du jeu de rôle.
Le choix du cadre est intéressant. En effet, la période historique dans laquelle se déroule le jeu est source de fascination et le choc entre deux cultures, l’Anglo-saxonne et la Nordique, est certainement annonciateur de situations intrigantes.
D’un point de vue technique, il nous est difficile de rendre un verdict après avoir joué uniquement via un système à distance. Graphiquement parlant, nous sommes au tournant de deux générations, sans surprise. Le monde est grand, plein de détails et offre un système de cycles jour/nuit. Un soin particulier semble avoir été apporté à des effets visuels, tels que la profondeur de champ et l’éclairage dynamique. En revanche, les reflets sont toujours rendus par moteur physique et non de ray tracing (impossible sur PS4 et Xbox One).
Sans prendre trop de risque, nous dirons que cet Assassin’s Creed Valhalla sera certainement plus beau sur PC et next gen. Mais il ne devrait pas offrir de changement visuel radical. Ce sera la tâche d’un futur titre que d’offrir un véritable changement générationnel.
Pour l’instant, on peut dire que Valhalla est un digne successeur d’Origines et Odyssée. Et qu’il répondra aux attentes de tous ceux qui ont aimé le nouveau parcours de la série. Nous ne pouvons pas, pour des raisons évidentes, rendre un jugement définitif, mais nous sommes indéniablement intrigués par cette nouvelle production d’Ubisoft.
Sortie prévue pour le 17 novembre 2020, sur PC, Xbox One, PS4, Xbox Serie X, PS5 et Stadia.
Article original disponible sur www.joypad.ch
Traduit de l’italien avec l’aimable autorisation de son auteur.
Retrouvez également les images de sa session démo ici :