Je lance Battlefield 6 sur PC, prêt à plonger dans ce que DICE nous promettait comme une campagne «cinématographique». Et effectivement, on a bien l’impression de participer à un film d’action… mais un de ceux qu’on n’aurait pas forcément envie de voir.
Solo : un film d’action qu’on ne regarderait même pas d’un œil distrait
L’histoire nous propulse dans un futur proche où plusieurs pays européens ont quitté l’OTAN. Une armée de mercenaires appelée Pax Armata émerge, financée par ces États dissidents et dotée, sans qu’on sache trop comment, d’une flotte de jets de combat dernier cri. Le joueur incarne un soldat américain envoyé pour remettre de l’ordre dans tout ce bazar.
Sur le papier, l’idée d’un affrontement indirect entre les États-Unis et l’Europe avait de quoi interloquer ; dans les faits, c’est une suite de missions décousues, d’explosions gratuites et de dialogues qui sonnent creux.
Ambiance
Chaque mission tente de nous en mettre plein la vue : bases souterraines, tempêtes de sable, débarquements sous la pluie battante, traversées de villes en ruine… tout y passe. C’est spectaculaire, visuellement impressionnant, mais terriblement creux. L’ambiance reste figée, sans tension dramatique ni souffle épique ; on se contente de regarder défiler les effets spéciaux sans jamais s’impliquer.

Bon c’était mes frères d’armes, mais, en faite, ils sont déjà morts … évidemment, ça m’en touche une sans bouger l’autre … moi je les ai découverts il y a 5-10 min
Doublage
Le doublage – vraisemblablement de la VF québécoise – n’arrange rien. Les voix sont majoritairement complètement à côté de la plaque émotionnellement. On a droit au soldat bourrin qui hurle ses répliques comme dans une mauvaise série B, ou au sergent-chef qui déclame ses ordres avec l’enthousiasme d’un fonctionnaire un lundi matin. Difficile de prendre au sérieux des personnages déjà peu profonds quand leur interprétation vocale frôle l’amateurisme. J’avoue avoir soupiré plus d’une fois devant des dialogues pseudo-épiques aussi crédibles qu’un politicien en campagne.
Graphismes et Réalisme
Techniquement, rien à redire : Frostbite fait toujours des merveilles. Les décors sont magnifiques, les effets de lumière bluffants et tout explose avec un sens du spectacle indéniable. On sent que la campagne sert surtout de vitrine technologique. Le problème, c’est qu’elle ne raconte rien d’intéressant. On enchaîne les séquences “waouh” sans se sentir concerné.
Le réalisme, lui, est en option. Imaginer des mercenaires gérer leur propre aviation militaire, c’est déjà un peu fort. Ajoutez à cela des ennemis à l’IA douteuse et des coéquipiers suicidaires et on se dit que la suspension d’incrédulité a ses limites.
Bref : un solo qui amuse vingt minutes, avant de rappeler pourquoi on joue à Battlefield pour son multijoueur – pas pour sa narration.

Toujours un plaisir pour l’immersion ces armes et ces caisses déposées négligemment partout sur votre passage
Multijoueur : l’action, la vraie, celle qu’on aime
Dès qu’on bascule en ligne, Battlefield 6 redevient Battlefield. Tout ce qu’on cherche est là : le chaos maîtrisé, les explosions à chaque coin de rue et ces « moments Battlefield » qu’on ne retrouve nulle part ailleurs. Cette adrénaline et cette action parfaitement dosées, pour avoir l’impression que la réussite de la bataille tient à notre escouade. D’ailleurs, la plus belle idée, celle qui change tout, c’est la possibilité de traîner un camarade blessé hors du feu pour le ranimer. Simple, mais géniale. Cette mécanique apporte un vrai sentiment de camaraderie et de réalisme. On se bat non plus pour un score, mais surtout pour ses coéquipiers.
Jouer à quatre : la meilleure façon de jouer à BF
C’est d’ailleurs en escouade de quatre joueurs que le jeu prend tout son sens. Avec des amis en vocal, le plaisir est immédiat : travail d’équipe, sang froid et persévérance sont les ingrédients de ces « moments Battlefield » que l’on poursuit et qui font mouche dans cet opus. Avec Founet et Olo, presque dix ans plus tard, on pense encore avec beaucoup d’émotion à notre « moment Battlfield » le plus mémorable. On était dans un immeuble à lutter de tout notre être pour tenir ce fichu point, en repoussant les unes après les autres ces vagues d’ennemis. Une telle excitation, une telle complicité que je pense pouvoir retrouver dans cet opus.
J’aurais quand même aimé avoir des modes à escouades variables, pour les fois où il manque une place pour ce dernier pote qui arrive plus tard, le jeu n’est pas vraiment fait pour jouer à plus de quatre et c’est bien dommage.

Elles sont belles ces pyramides … mais elles sont en principe impossible à voir depuis le centre du Caire … ça change de COD qui avait par exemple numérisé assez précisément les canaux d’Amsterdam ou le centre de Washington …
Modes de jeu : Il y en a pour tous les goûts, même les mauvais
Battlefield 6 regroupe plusieurs modes bien connus : Conquête, Crescendo et mes préférés, Percée, Ruée. Le nouveau mode Crescendo, où les points de contrôle disparaissent progressivement, resserrant le combat jusqu’à un affrontement final d’une intensité folle. Le classique mode Conquête, véritable pierre angulaire de la franchise : deux équipes se disputent le contrôle de plusieurs drapeaux sur la carte, le but étant de faire tomber les tickets (points de renfort) adverses à zéro. Conquête, c’est le bac à sable par excellence, où l’action est non-stop et part dans tous les sens, mais aussi avec plein de crottes de chat: on se fait spawn kill, on a de la peine à anticiper où se situe la menace – je trouve ce mode horrible.
Les modes Percée et Ruée, fusionnés dans un même ensemble, sont sans doute, pour moi, les plus réussis. Ils concentrent l’action sur un ou deux points précis, donnant à chaque affrontement une structure lisible et épique. On sent le front, on comprend la ligne de bataille, on avance vraiment. Contrairement à la Conquête, parfois un peu brouillonne, ici tout est plus tendu, plus clair, plus jouissif.
Et puis, il y a Portal, l’atelier communautaire où les joueurs peuvent créer leurs propres cartes, règles et scénarios. Véritable hommage à l’histoire de la série, ce mode offre un terrain d’expérimentation sans limites – un cadeau pour les nostalgiques comme pour les créateurs. Nul doute que de sacrées pépites vont sortir de ces entrailles, tant la communauté et le génie collectif peuvent faire des merveilles.
Progression : la carotte et le bâton
C’est là que le bât blesse un peu. Comme beaucoup de jeux modernes, Battlefield 6 s’appuie lourdement sur son système de progression : déverrouiller des armes, gadgets, skins… encore et encore.
Et c’est dommage, parce que le jeu est suffisamment bon pour se suffire à lui-même. On n’a pas besoin d’une carotte numérique pour s’amuser. Pourtant, le système est bénéfique et il fonctionne : le petit “+100 XP” qui s’affiche après la réanimation d’un coéquipier nous pousse à continuer, à faire les « bons » choix, ce qui est une bonne chose pour le gameplay et le travail d’équipe.
Reste que le principe même fait appel à notre petit cerveau gourmand de récompenses : une partie de plus, juste pour atteindre le niveau suivant et enfin obtenir ce sniper à lunette thermique… puis une autre pour tester ledit fusil… puis une autre parce qu’on est à deux doigts d’avoir le prochain gadget… Bref, Battlefield n’est pas avare en mécaniques de rétention. À pratiquer avec modération, sous peine de cernes le lundi matin !

Y a des phases sympas en blindés, mais c’est quand même très scripté, le game design fait très vieux.
Les nouveautés et les manques
DICE semble avoir tiré les leçons du passé. Fini les spécialistes exotiques : retour aux quatre classes classiques – Assaut, Ingénieur, Soutien et Éclaireur. Une décision saluée par tous, tant elle redonne une vraie structure au gameplay d’équipe.
Autre bonne idée : la mobilité a été largement améliorée. On glisse, on escalade, on traverse les vitres, on peut même faire des roulades lors des chutes – tout est plus fluide, plus instinctif.
Mais tout n’est pas parfait. Le jeu manque encore cruellement de cartes. On tourne vite en rond, et on sent venir la stratégie commerciale : distiller du contenu au compte-gouttes pour retenir les joueurs. C’est frustrant, surtout quand le reste est aussi réussi.
Conclusion : Battlefield 6 est un très bon jeu multi pour quatre joueurs, si vous n’avez pas au moins trois potes, vous devriez passer votre chemin.
Le solo de Battlefield 6 donne l’impression d’avoir été conçu à la va-vite, pour ne pas répéter la shit storm du précédent opus. Je peux comprendre l’utilité de sa présence. Il est à la disposition des plus débutants qui ont besoin d’ennemis docile et facile à abattre. Le multijoueur, lui, s’il est joué à quatre est souvent brillant. Les batailles y sont d’une intensité rare, les mécaniques de coopération très bien équilibrées et le plaisir arrive très vite, mais il nécessite cette condition très importante: il doit se jouer à quatre et avec une philosophie commune. Si la moitié de l’équipe veut rester en arrière avec des snipers et l’autre foncer sur les points, ça va moins bien marcher.

J’ai eu un appel pile à ce moment … resté 15 min comme ça, il n’a pas bronché … un game design vraiment d’un autre temps, je vous dis.
Battlefield 6 c’est aussi des moments très WTF et des bugs. J’ai par exemple assisté à une descente de coude d’un avion de chasse sur un hélicoptère de combat. Tel John Cena qui fonce avec son coude en avant sur Triple H… Ou des cadavres catapultés comme des poupées de chiffons. On a aussi le très désagréable bug du générique… En effet, si vous manquez de chance, vous vous retrouvez avec le générique de début tout le long de votre partie. Franchement, c’est assez anecdotique pour que ça fasse davantage sourire que ça ne dérange.
Battlefield 6 a le potentiel de vous faire vivre des moments vidéo ludiques inoubliables et c’est ça l’essentiel. C’est bruyant, chaotique, parfois frustrant… mais terriblement vivant.
Et quand on se retrouve à tirer un coéquipier blessé à couvert pendant qu’un char explose à deux mètres, on se dit que oui – là il y a de l’émotion, l’adrénaline et l’impression de jouer nos vies.

Il y a quelques petits bugs, mais, globalement, le multi est plutôt bien fini et les bugs impacts très rarement le gameplay.
Notes: Solo : 3.5 alibi/10
Multi : 8.5 obus flèche /10
Testé sur PC, également disponible sur PS5 et Xbox Series.








